L a Guinée se trouve aujourd’hui à un moment charnière de son histoire institutionnelle. Alors que le pays s’engage dans une dynamique de refondation, plusieurs nominations récentes interrogent la cohérence entre visibilité médiatique et compétence technique.
Sans remettre en cause la vision nationale de transformation, une question demeure essentielle : les critères de notoriété numérique peuvent-ils se substituer aux références professionnelles pour diriger des institutions stratégiques de l’État ?
𝗟𝗲𝘀 𝗻𝗼𝗺𝗶𝗻𝗮𝘁𝗶𝗼𝗻𝘀 𝗲𝗺𝗯𝗹é𝗺𝗮𝘁𝗶𝗾𝘂𝗲𝘀 : 𝗹’𝗢𝗚𝗣 𝗲𝘁 𝗹𝗮 𝗦𝗢𝗡𝗔𝗣
Deux cas concentrent aujourd’hui l’attention : celui du Directeur Général Adjoint de l’Office Guinéen de Publicité (OGP) et celui du Directeur Général Adjoint de la SONAP.
Ces personnalités, très présentes sur les réseaux avant leur nomination, ont acquis une notoriété en ligne qui a façonné leur image publique.
Dans le cas de Jean-Marie Soriba Coumbassa, dit Jeannot Coumbassa, plusieurs médias évoquaient dès décembre 2024 une nomination davantage liée à sa visibilité numérique qu’à des références managériales établies.
Quelques mois plus tard, en juin 2025, d’autres sources jugeaient cette désignation controversée, estimant qu’elle n’avait pas apporté la stabilité attendue à l’OGP.
S’agissant de Fama Kanté, nommé Directeur Général Adjoint de la SONAP, divers médias soulignaient un profil de communicant très visible sur les réseaux, sans confirmation officielle d’une spécialisation géopolitique ou militaire.
Il apparaît ainsi comme un acteur à forte présence digitale, dont la carrière institutionnelle débute dans un environnement hautement stratégique.
Ces exemples traduisent une tendance émergente : l’entrée de figures issues de l’espace numérique dans des sphères historiquement réservées aux profils administratifs ou technocratiques.
𝗟’𝗮𝗳𝗳𝗮𝗶𝗿𝗲 𝗱𝗲 𝗹’𝗢𝗚𝗣 : du desavouement à la crise d’image
Le 29 octobre 2025, le DGA Jean-Marie Soriba Coumbassa a suspendu un cadre pour sous-facturation.
Le Directeur Général, Aladji Cellou Camara, a immédiatement annulé cette décision, rappelant son autorité hiérarchique exclusive. Ce désaveu public a ouvert un conflit interne au sein de l’institution.
Le 1er novembre 2025, plusieurs médias ont évoqué des dérives hiérarchiques et des règlements de comptes au sommet, confirmant l’ampleur des tensions.
Le 5 novembre 2025, un article a révélé que le DGA devait justifier plus d’un milliard et demi de francs guinéens, dont 518 millions pour un projet à Fria et 200 millions pour une marche à Boké.
Les médias mobilisés disposent d’une audience particulièrement vaste, ce qui a favorisé une diffusion rapide de ces informations et une multiplication des relais sur les réseaux sociaux dès le matin.
Cette propagation témoigne d’une forte résonance médiatique et d’une capacité d’influence accrue, transformant un différend administratif en enjeu public.
La dynamique observée illustre comment l’espace numérique amplifie les controverses internes, façonne la perception de la gouvernance et redéfinit certains équilibres institutionnels.
Lecture d’intelligence économique
L’affaire de l’OGP peut être lue à travers trois séquences successives.
D’abord, un conflit d’autorité révélant les fragilités de la chaîne hiérarchique. Ensuite, une bataille du récit, chaque partie cherchant à légitimer sa position à travers des relais médiatiques. Enfin, un déplacement vers la redevabilité financière, où la justification des fonds devient le centre de gravité du débat public.
Cette trajectoire démontre comment une divergence de gouvernance se transforme en crise de réputation, tout en soulignant la puissance des vecteurs médiatiques et l’importance stratégique du contrôle de l’information au sein des institutions de l’État.
Pour une refondation fondée sur la compétence et la redevabilité
La refondation nationale vise une Guinée plus forte, plus responsable et plus moderne. Pour y parvenir, il faut concilier audace générationnelle et rigueur institutionnelle.
Les dirigeants issus de l’espace numérique apportent une énergie nouvelle et une maîtrise des codes contemporains de communication, mais cette modernité exige des outils de gouvernance solides, des contrôles internes efficaces et une formation administrative adaptée.
La réussite de cette refondation dépendra de la capacité à faire coexister visibilité, compétence et responsabilité au service exclusif de l’État.
Références sourcées
Guinee7 – 19 décembre 2024
Le Projecteur Guinée – 3 juin 2025
Kalenews – 29 octobre 2025
Guinee7 – 1er novembre 2025
Guinee7 – 5 novembre 2025
ActuGuinée – 27 mars 2025
ConakryInfos – 28 mars 2025
Alpha DIALLO, Expert en Management Stratégique et Intelligence Économique, Fondateur de Guineeactuelle.com


