L e glissement de terrain survenu le 20 août dernier, à Manéah continue de susciter des réactions et des analyses sur les causes. Alors que le bilan humain et matériel reste lourd, des voix s’élèvent pour mettre en cause la responsabilité du consortium chargé de la construction de la route Kagbelen–Kouriah, lancé en 2023 et composé des sociétés Guicopress, Guiter et Begec Travaux.
Selon l’ingénieur minier Lamarana Diallo, consultant en développement minier durable et diplômé de Polytechnique de Montréal, de l’Université Lyon 1 et de l’Institut supérieur des mines et géologie de Boké, ce drame ne saurait être assimilé à une catastrophe naturelle. Dans son analyse, il estime qu’il s’agit d’ une “faute professionnelle”
Des manquements pointés du doigt
D’après lui, le talus creusé dans le cadre des travaux de construction, situé à proximité de zones habitées, présentait un risque évident.
« Le consortium aurait ouvert, au début des travaux, une tranchée avec un talus raide et instable, sans soutènement ni système de drainage, à seulement quelques mètres de maisons habitées. Tout ingénieur en géotechnique sait qu’un sol latéritique sans protection peut devenir instable sous l’effet des intenses pluies », souligne-t-il.
L’analyse s’appuie également sur des images satellites de 2022, montrant que la zone était auparavant végétalisée, ce qui limitait l’érosion naturelle.
« L’ouverture de cette tranchée avec un talus raide sans mesure de protection pourrait être responsable en partie de cet événement », ajoute M. Diallo, estimant que cet accident « n’est pas seulement la faute de la pluie ou du destin, c’est un événement provoqué par imprudence ».
Un problème structurel dans le secteur BTP
Au-delà du cas précis de Manéah, l’ingénieur met en avant des faiblesses plus larges du secteur des travaux publics en Guinée. Selon lui, ce drame révèle notamment :
- des études géotechniques « souvent bâclées ou inexistantes »,
- et un contrôle technique « souvent insuffisant ».
Pour éviter la répétition de tels incidents, il recommande « des études géotechniques complètes avant toute excavation », l’imposition de normes strictes de sécurité, ainsi que la responsabilité civile et pénale des entreprises impliquées en cas d’accident.
Vers plus de responsabilité
M. Diallo insiste également sur le rôle de l’État et des organismes de contrôle, plaidant pour un « renforcement du contrôle indépendant des chantiers publics ».
Plus loin, l’ingénieur minier Lamarana Diallo appelle enfin à une prise en charge des victimes.
« Les familles touchées doivent être indemnisées », affirme-t-il.
En attendant les résultats officiels des enquêtes, cette analyse met en lumière la nécessité pour les autorités et les entreprises de repenser les pratiques de gestion des chantiers afin de mieux protéger les populations riveraines.
Alpha Ibn Boubacar Diallo pour www.guineeactuelle.com