D ans la plupart des pays africains, des milliers d’enfants abandonnent les bancs de l’école pour vendre dans les rues. Invisibles aux yeux des autorités, tolérés par la société, ces enfants symbolisent une misère devenue ordinaire.
A chaque carrefour, on aperçoit des enfants, plateau sur la tête ou marchandise en main, à la recherche de clients. Visages couverts de poussière, ils proposent de l’eau, des arachides ou des mouchoirs ou autres objets. Ces enfants, dont l’âge ne dépasse pas souvent les treize ans, au lieu d’aller à l’école, travaillent quotidiennement.
Ce phénomène n’épargne pratiquement aucun pays du continent. De Dakar à Conakry, d’Abidjan à Kinshasa, les enfants des rues forment une armée silencieuse, livrée à elle-même, exposée à tous les dangers. Et pourtant, plus personne ne semble s’en émouvoir.
L’Afrique est l’un des continents les plus riches en ressources naturelles. Pourtant, ses enfants figurent parmi les plus exposés à la pauvreté extrême.
Un paradoxe cruel du moment où certains exploitent le sous-sol pour bâtir des empires alors que d’autres envoient leurs enfants vendre dans les rues pour survivre.
L’exploitation économique des mineurs n’est pas un hasard. Elle est le reflet d’un déséquilibre profond: pauvreté des familles, échec des politiques publiques, affaiblissement du tissu social et priorités économiques désalignées.
Dans la plupart des pays africains, le travail des enfants est interdit par la loi. Mais dans la réalité, ces textes sont souvent ignorés ou contournés. Par manque de contrôle, de volonté politique ou d’alternatives concrètes pour les familles, la rue reste la seule « solution » pour des milliers d’enfants.
La banalisation de ce phénomène est l’un des aspects les plus inquiétants. De nos jours, ces enfants deviennent partie intégrante du décor urbain, comme si leur présence dans la rue allait de soi.
Mais ne rien faire, c’est accepter. Ne rien dire, c’est laisser faire. Et au bout du compte, c’est devenir complice d’une violence sociale silencieuse mais destructrice.
Interrogé par un de nos reporters, un sociologue guinéen propose une piste de solution pour mettre fin à cette tragédie.
“Il faut des actes concrets. Il faut rendre l’école accessible et obligatoire. Il faut soutenir les familles les plus vulnérables. Il faut appliquer réellement les lois de protection de l’enfance. Il faut impliquer les communautés, les ONG et les médias” lance-t-il sous le sceau de l’anonymat.
Pour lui, protéger les enfants, c’est construire un avenir plus juste. Et c’est affirmer que la croissance ne peut pas se faire sur le dos de l’enfance sacrifiée.
“Le choix est collectif, la responsabilité aussi. L’indifférence n’est plus une option. Il est temps d’agir”, a-t-il estimé, affirmant que derrière chaque enfant qui travaille, il y a un rêve brisé.
Alpha Ibn Boubacar Diallo