Refus de secourir des blessés : la croix-rouge guinéenne est-elle complice du gouvernement ?

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D epuis près d’un mois, les morts et les personnes blessées par balles lors des manifestations du FNDC sont « refoulés » systématiquement par les hôpitaux publics. La Croix-Rouge guinéenne a également été accusée d’avoir délibérément refusé de porter secours à des blessés, notamment le jeune Idrissa Barry, blessé à la tête le 13 février dernier.

La Croix-Rouge aurait été sourde aux appels des proches du jeune Idrissa qui a succombé quelques heures après.

Selon le FNDC, le gouvernement aurait même menacé des cliniques privées ayant soignés des blessés au point que celles-ci comptent ne plus recevoir d’éventuels blessés lors des manifestations.

Dans une lettre adressée au Directeur du Comité International de la Croix-Rouge, dont copie est parvenue à notre rédaction, le FNDC invite la Croix Rouge de prendre toutes les dispositions et sanctions nécessaires à l’encontre de sa délégation en République de Guinée afin que de pareils comportements ne se reproduisent.

Lettre

A l’attention du M. Yves DACCORD                                                                       

Directeur général du Comité International de la Croix-rouge

Monsieur le directeur général,

Par le présent courrier, je tiens à attirer votre attention, en tant que coordinateur du FNDC (Front nationale pour la défense de la constitution), sur le comportement inadmissible de la représentation de la Croix-Rouge en République de Guinée.

Depuis le 14 octobre 2019, des manifestations contre la réforme constitutionnelle se déroulent en Guinée. Ces mouvements de protestation massifs sont réprimés dans le sang par les forces de défense et de sécurité.

A l’heure actuelle, nous déplorons 38 morts, dont 36 par balles, sans compter les centaines et les centaines de blessés. Amnesty International a dénoncé ces violations massives des droits humains dans une publication de novembre 2019 intitulée : « Guinée. Les voyants au rouge pour les droits humains à l’approche de l’élection présidentielle ». Le parlement de l’Union Européenne a voté le 13 février 2020 une résolution condamnant « la répression et toutes les violences et assassinats qui ont eu lieu » et exprimant « sa solidarité avec les mobilisations populaires ».

Je tiens à porter à votre connaissance que les hôpitaux publics refusent de prendre en charge les blessés civils lors des manifestations, ayant manifestement reçu des ordres de la part du gouvernement, et ce en violation du serment d’Hippocrate. Les corps sans vie sont également refoulés des structures publiques. Les familles des victimes se tournent alors vers la délégation de la Croix-Rouge en République de Guinée. Or, cette représentation refuse, elle aussi, de porter assistance aux blessés. Le dernier cas en date est celui de ce jeune homme de 15 ans, Idriss Barry, qui blessé à la tête par un tir à Wanindara, une banlieue de Conakry, n’a pu être soigné. Il est mort des suites de ses blessures, le 13 février dernier.

La Croix-Rouge à Conkary avait pourtant été sollicitée pour sauver l’adolescent, mais les appels désespérés des proches du jeune homme sont restés lettre morte.

Nous ne pouvons croire que la Comité international de la Croix-Rouge est informé de ces pratiques qui déshonorent cette vénérable institution, dans son ensemble.

En effet, depuis la bataille de Solférino en 1859, la Croix-Rouge a toujours porté assistance aux victimes, sans préjuger de leur camp.

Je demande instamment au Comité international de la Croix-Rouge de prendre toutes les dispositions et sanctions nécessaires à l’encontre de sa délégation en République de Guinée ; afin que de pareils comportements, indigne de l’éthique irréprochable de la Croix-Rouge, ne soient amenés à se reproduire et que par la faute de son inaction, un adolescent de 15 ans ne perde la vie.

Je reste bien entendu à votre entière disposition pour tout renseignement complémentaire, ou pour produire tout témoignage corroborant mes dires.

Je vous remercie par avance de toute l’attention que vous voudrez bien porter à mon courrier et je reste certain que vous saurez apporter une réponse à la hauteur du drame qui se joue en République de Guinée.

Dans cette attente, je vous prie de recevoir, Monsieur le directeur général l’expression de mes salutations distinguées.

Le coordonnateur du FNDC

Abdourahmane SANO

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