Contentieux électoral, l’opposition au-devant d’un autre piège

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L’opposition républicaine entame cette semaine, une série de manifestations pour, dit-elle, dénoncer l’injustice et les tueries de ces derniers temps à Conakry. Elle procède en effet ce lundi 19 mars 2018 à l’inhumation des corps des victimes de la manifestation du 14 mars 2018. A l’origine de ces nouvelles violences et des tensions sociales aux relents ethniques, les résultats définitifs des élections communales du février 2018 que Cellou Dalein et Cie s’évertuent à rejeter.

Les résultats en question donnent une large victoire au RPG arc en ciel. L’UFDG du chef de file de l’opposition, bien que deuxième en termes du nombre de conseillers élus et des chances d’occuper les têtes des exécutifs communaux, ne veut pas se contenter du score « à elle attribué » par la Commission électorale nationale indépendante. Les enjeux sont au-delà des communes rurales et urbaines. Il s’agit de la possibilité pour les deux partis majoritaires de désigner les présidents des conseils de quartiers et de districts. Les deux avaient au fait tout préparé, lorsqu’à l’Assemblée nationale, leurs députés ont modifié la loi électorale.

Si le RPG arc en ciel a besoin des conseils de quartiers pour se maintenir lors des prochaines législatives et présidentielle, l’UFDG souhaite se munir de la même arme de contrôle et de vol des voix pour pousser l’adversaire vers la sortie. En dépit donc des dénonciations des formations politiques dites minoritaires et des organisations de la société civile, les parlementaires n’ont pas hésité à adopter ce texte qui crée de multiples problèmes. Inutile de dire qu’il est la cause des désaccords actuels. Le vote par procuration, le recours aux magistrats des tribunaux de première instance en cas de contentieux, alors que ce sont eux qui président les commissions administratives de centralisation des votes et la publication par la CENI des résultats définitifs, sont tous prévus par la fameuse loi. A l’époque, les politiques n’ont décidé que de l’annulation des votes dans les quartiers et districts. Cellou Dalein Diallo l’a dit récemment dans l’émission ‘’les Grandes Gueules’’ de la radio Espace FM : « Nous n’avons pas regardé ces détails ». Les députés de la majorité présidentielle savaient ce qu’ils faisaient, du moins nous pouvons le penser, puisque tout est à leur avantage.

Le risque de reporter les législatives

Nos institutions se construisent et se déconstruisent en même temps. Ainsi, au moment où l’on vit ces tumultes, le pays n’a pas de cour constitutionnelle. Et les politiques ne semblent pas avoir confiance au Conseil supérieur de la magistrature pour porter plainte contre les magistrats indélicats. On est en droit de s’interroger pourquoi avons-nous réclamé ces communales ?  Etait-il nécessaire de récuser les délégations spéciales ? Puisque l’opposition demande un dialogue qui va sans doute aboutir à de nouveaux arrangements. Quoi qu’on dise, le RPG arc en ciel non plus, n’acceptera les résultats dont disposent les opposants.

Le choix que fait la classe politique risque de bloquer le pays et fragiliser les collectivités. Pendant que les contestations se poursuivent, personne ne semble s’interroger sur la gestion actuelle de nos communes. Plus de délégations spéciales recomposées. Pas de conseillers élus. Alors, les administrateurs gèrent comme ils peuvent. On s’étonnera après qu’il n’y ait pas de développement à la base. Trop d’incohérences à la fin. Les élections dont on conteste la crédibilité sont comme un frein pour de nouvelles initiatives en vue des prochaines échéances. Nous sommes à la fin du premier trimestre de l’année. Rien n’est encore dit sur les élections législatives censées se tenir en septembre. Il y a bien un risque de se retrouver avec un parlement illégitime en 2019. Cet autre décalage aura sans doute des répercussions sur le processus devant conduire à la présidentielle de 2020. Mais ça c’est une autre histoire. Mais c’est à se demander si tout ça n’est pas fait à dessein ?

Jacques Lewa

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