Cellou dalein diallo/ entre le rattrapage de l’histoire et l’appartenance ethnique, où se situe l’épine dans les pieds de l’ufdg ?

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P ersonne ne conteste en Cellou Dalein Diallo,  ses compétences intrinsèques et sa carrière, sa longue expérience pour ainsi dire de la chose publique. Il est en tout cas admis, au-delà de son éloquence et du souci du détail qui l’inspire, que cette première assertion ne souffre d’aucune contestation.

La question qui se pose alors est celle de savoir pourquoi une bonne partie des guinéens ne lui portent pas confiance. Est-ce des reproches contre sa gestion pendant ces longues années des affaires publiques ? Ou bien est-il tout simplement une victime parmi tant d’autres, de l’ethnicité des guinéens ?

Pour comprendre Cellou Dalein Diallo, nous allons poser une série de questions dont les éléments de réponses permettront de situer le problème. C’est un sujet qui mérite d’être profondément débattu, d’autant plus qu’il reste  présidentiable pour les prochaines élections et pour le moins le plus favori.

 QU’EST-CE QU’ON POURRAIT REPROCHER À CELLOU DALEIN DIALLO ?

On ne saurait le dire avec précision, mais il porte en lui le passif du régime de Conté. Il est comme bien d’autres d’ailleurs accusés à tort ou à raison d’avoir pendant des années durant  contribué aux résultats << catastrophiques >> du régime de Lansana Conté. On l’accuse d’avoir joué au népotisme et d’avoir favorisé plutôt les personnes de la même ethnie que lui. On explique très souvent ce comportement par son limogeage à la primature pour faute lourde.

SUR LE PROBLÈME ETHNIQUE, POURQUOI  EST-IL AUTANT CLIVANT, ET QUEL RÔLE JOUE  SON ENTOURAGE ?

Si Cellou Dalein Diallo n’est pas le seul ancien ministre et le seul ancien premier ministre du Général Lansana Conté à faire la politique, il reste clair pourtant qu’il soit le plus vu et le plus critiqué. La seule explication plausible viendrait du fait qu’il en est le plus populaire et le seul qui soit réellement si proche du but. Cette proximité et ce long suspens l’exposent davantage et nourrissent la virulence de ses détracteurs.

Si le penchant ethnique de Cellou Dalein Diallo en personne reste encore à prouver, pour de nombreux observateurs, l’attitude de son entourage et surtout de bien de militants du parti inquiète. Il s’agit de tous ces propos va-en-guerre, des débordements pendant les manifestations, du discours exclusif et victimaire entretenu, même contre des vérités historiques, et cette tendance à vouloir considérer toute personne opposée à L’UFDG, comme un ennemi des peulhs.

L’UFDG EST-IL DE CE FAIT UN PARTI  ETHNIQUE ?

Non, pas par principe ! Mais ce qui est vrai, c’est que sur l’échiquier politique guinéen, le fonctionnement de tous les partis politiques est presque sur la base ethnique. Force est de constater que l’UFDG n’en fait pas exception. Les militants s’identifient en premier lieu à l’ethnie des présidents des partis politiques, avant même de savoir leur projet politique, pourvu qu’il en existe. C’est ainsi que les Malinkés ont trouvé à Alpha Condé, l’image du sauveur des mains du régime de Lansana Conté. Puisqu’il s’agit de parler de l’UFDG, il faut reconnaître aujourd’hui qu’il existe au sein du parti et à des postes stratégiques, d’autres personnes de différentes ethnies. On peut citer à titre d’exemple assez remarquable le Poste de 1er Vice-Président de Dr. Oussou Fofana.

CELLOU DALEIN DIALLO EST-IL COMBATTU  MALGRÉ TOUT PARCE QU’IL EST PEULH ?

Oui, il est combattu parce qu’il est peulh. Cela est valable d’ailleurs pour tous les guinéens. Il suffit qu’on identifie ton ethnie et les autres te combattront. J’imagine que sur cette question de l’appartenance ethnique précisément, on ne  parle que de préjugés, de stéréotypes entretenus par la société, dans nos familles. Le guerzé voit au Konianké l’envahisseur ; le Konianké voit au guerzé un homme à qui il ne doit absolument rien. Il existe des stéréotypes pour chaque ethnie, chaque nom de famille. C’est pour dire que ce que l’on reproche à Cellou Dalein Diallo sur sa gestion est souvent le refoulement de ce qu’on lui reproche ethniquement, et vice-versa. Mais pour rendre justice à l’homme, c’est le lieu de rappeler qu’il y a eu un presque «tout sauf Cellou» en 2010¹. La construction d’un mythe faisant part d’un vaste programme de vengeance peuhl une fois au pouvoir, une vaste campagne de désinformation, tout ça pour barrer la route à Cellou Dalein Diallo. C’était machiavélique et tous les guinéens sont tombés dedans. Mais en réalité << ce scénario de division ethnique est le résultat de l’incapacité des politiques à pouvoir fédérer les électeurs autour des idées et des valeurs. Ils optent pour la facilité en misant sur la fibre ethnique pour arriver à leur fin.»²

Cela étant dit, il est nécessaire de préciser que Cellou Dalein Diallo est aussi en quelque sorte  victime de lui-même, de ses stratégies et de l’inefficacité du cadre juridico-politique à arbitrer les différends sociaux et politiques dont il a lui-même contribué à l’érosion, pendant son passage au gouvernement de Conté. Il est tristement le «grand parrain » du coup d’État constitutionnel de 2001. En effet, il ne faut pas seulement se focaliser sur Alpha Condé. Il faut interpréter ce que nous vivons comme la conséquence de notre histoire politique et des problèmes systémiques qui ont empêché l’émancipation de la démocratie en Guinée.

CELLOU DALEIN DIALLO RESTERA-T-IL  MALGRÉ TOUT UN AVANTAGE POUR l’UFDG EN VUE DE GAGNER LES PROCHAINES  ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES ?

Cela reste probable, en dépit de la mobilisation que pourrait susciter sa candidature. Si Cellou reste encore populaire, Il est aussi vrai que ce coup d’État vient de bouleverser tout le statu quo de notre échiquier politique. Alpha Condé n’est plus dans l’arène, et c’est tout un électorat qu’il faudra reconsidérer. Avec la probabilité de la présence de Sidya Touré, de Lansana Kouyaté et / ou de Ousmane Kaba à ces prochaines élections, tout est possible. On pourrait également prévoir la rentrée en force de nouveaux visages plus ou moins consensuels ( qui sait ? ) et tout simplement des jeunes leaders comme Aliou Bah qui est en train de faire une ascension fulgurante…

PUISQU’ALPHA CONDÉ N’EST PLUS  PRÉSIDENT, l’UFDG NE SE DONNERAIT-ELLE  PAS UN AVANTAGE DE PLUS EN ÉCARTANT CELLOU DALEIN DIALLO ? DANS UNE TELLE HYPOTHÈSE À QUI PEUT-ON PENSER INCARNER CETTE ALTERNATIVE AU SEIN DU PARTI ?

Il faut d’abord préciser que la dynamique actuelle au sein du Parti ne présage pas pour l’heure, de telles suppositions. L’idée même d’une alternance à la tête du parti pourrait être perçue comme une trahison tout simplement. Mais si le cours des événements rendrait possible cette relative << utopie >>.  Il serait très difficile de trouver au sein du parti un candidat aussi populaire que Cellou Dalein Diallo. Cela dit, je pense qu’il est possible de laisser la place à d’autres figures. Qui ? je ne sais pas. Je ne suis pas membre de l’UFDG. Mais je sais que la transition démocratique passera aussi par le renouvellement des figures politiques.

PEUT-ON AUJOUR D’HUI FAIRE LE BILAN DE CELLOU DALEIN DIALLO, À LA TÊTE DE L’OPPOSITION GUINÉENNE ?

S’il est vrai que le pouvoir d’Alpha Condé a largement impacté les stratégies politiques de l’opposition dans son entièreté, notamment par l’instrumentalisation de la justice, ‘’les bavures policières’’, ces centaines de martyrs pour la démocratie, il faut aussi dire que l’UFDG s’était déjà mise dans une certaine ‘’radicalisation’’ de l’action politique, même si cette radicalisation est à tempérer par la disposition à aller aux différents dialogues politiques dont les résultats sont ce qu’ils sont. Cellou Dalein Diallo à l’opposition peut-il être après tout considéré comme celui qui s’est juste opposé, avec moins de propositions et à la clé, la critique pour programme politique ? La question reste posée.

Mais à sa décharge, Cellou Dalein Diallo, loin des regards de certains militants de son parti dont le comportement inquiète, reste un leader transversal épris de paix, de rassemblement, de tolérance. Mais ces qualités reconnues en l’homme suffisent-elles aujourd’hui à lui ouvrir les portes de la magistrature suprême, en dépit de tout qui a été susmentionné et la volonté exprimée de la majorité des guinéens pour le renouvellement de la classe politique ?

Précisément sur le besoin de renouvellement de notre classe politique, examinée dans une large mesure, et au point où nous en sommes presque au blocage, serait-ce aujourd’hui trop demander à Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré, Lansana Kouyaté, à Dr. Ousmane Kaba, Dr. Faya Millimouno, Mamadou Sylla, pour ce citer que ceux-ci, ces têtes d’affiche de notre vie politique dont on a tous eu l’habitude de voir et de revoir et qui, d’une manière ou d’une autre sont considérés aujourd’hui même, par les uns ou par les autres, individuellement ou collectivement pris, comme la suite de notre dérèglement politique, les véritables derniers problèmes à régler, de se retrouver comme dans un conclave, réunis au-delà de leurs différends et sensibilités aux fins de nous trouver une solution concertée de sortie de crise ou, comme poussés par la nécessité de laisser ce peuple respirer un air nouveau, tous ensemble, en patriotes dévoués, et volontairement, de désister pour les prochaines élections présidentielles et se consacrer à un travail de parrainage ou même d’occuper d’autres fonctions où ils sauront conseiller et faire bénéficier à ces millions de guinéens leurs expériences ?

Peut-on espérer une telle mesure si ‘’radicale’’ mais sensée ? Serait-ce alors à nous autres d’inciter ces leaders politiques à prendre de telles démarches ? Comment pourrions-nous y arriver ? Mieux, les ambitions politiques des uns et des autres emporteraient-elles sur la quiétude des guinéens ?

Pourrait-on m’accorder le bénéfice du doute si je disais que cette idée est bien partagée si ce n’est par tous les guinéens, mais l’écrasante majorité ?

« Je ne cherche pas à connaître les réponses, je cherche à comprendre les questions » disait Conficius.

À toutes ces questions incessantes et aux mille enjeux, vous comprendriez la responsabilité de vous laisser y répondre.

¹. LIBÉRATION (journal), 15 Sept. 2010. Présidentielle sur fond de tensions ethniques.

². La politisation des administrations politiques en Afrique, Page 35 de Mamadou Gando Bah

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Nb : Mes sincères remerciements à tous les amis qui ont bien voulu m’aider dans la rédaction de ce texte. Vous avez toute ma reconnaissance.

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Ali CAMARA

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