Abdoulaye yéro baldé, un homme incontournable pour la transition en cours ?

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C ’est un secret de polichinelle. Le nom d’Abdoulaye Yéro Baldé n’est plus à présenter aux guinéens. Homme du sérail, cadre compétent et expérimenté, constant dans ses rapports avec ses proches et à la Guinée, ce cinquantenaire à la réputation exaltante porte en lui l’une des personnalité les plus recherchées par le peuple de Guinée.

Guineeactuelle.com revient, à travers ce billet, sur le parcours de celui que l’ancien Chef de l’Etat, Alpha Condé, aimait affectueusement appeler « Mon fils ».

Parcours et background

« Abdoulaye Yéro Baldé est un homme à la forte personnalité. Son parcours et son background en disent long sur qui il est. Il a l’air, et c’est déjà prouvé, d’avoir une conviction forte. Mieux, je pense qu’il reste un homme intègre. Sinon, comment comprendre qu’il dise NON à celui dont l’opinion clame être son père spirituel (Alpha Condé, ndlr) ? », allègue Moise Camara, un politologue, interrogé par un de nos reporters.

Mais qui est-il vraiment ?

Abdoulaye Yéro Baldé est né en 1965 à Gagnoa, en Côte d’Ivoire. Il dispose d’une vaste expérience professionnelle de plus de 25 ans dans des postes de responsabilité au sein du gouvernement, des organisations internationales, du secteur privé et du milieu universitaire, aussi bien au niveau national qu’international.

De janvier 2016 à février 2020, il a été Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique. A ce poste, il était en charge de la conception, de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique gouvernementale dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique.

Avant de rejoindre le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, il a occupé la fonction de 1er Vice-Gouverneur de la Banque centrale de Guinée, de 2010 à 2015, où il était en charge des questions de politiques monétaires et de change, de la supervision bancaire et financière ainsi que celle des assurances.

Auparavant, Abdoulaye Yéro Baldé a travaillé entre 2005 et 2010 d’abord comme Vice-Président Finance à Global Alumina à New York, puis Directeur Financement Projet et Relations Gouvernementales à Guinea Alumina Corporation à Conakry (GAC- une joint-venture entre Global Alumina, Bhp Billiton, Dubal et Mubadala pour construire une raffinerie d’alumine à Sangaredi ; un investissement d’environ 5 milliards de dollars ) où il a conduit et coordonné, entre autres, les questions liées au financement des infrastructures du projet.

Entre 1996 et 2002, Yéro Baldé a occupé le poste d’Economiste à la Banque Mondiale à Conakry où il a travaillé à la conception et la mise en œuvre d’opérations macroéconomiques et de programmes de développement avant d’aller poursuivre ses études aux Etats-Unis.

Il a également bénévolement donné des cours d’économie à l’Université de Conakry de 1997 à 1999.

Depuis 2017, il est membre du Conseil d’Administration de la Banque de Technologie des Nations Unies.

Monsieur Baldé est titulaire d’un MBA obtenu à la Columbia Business School (Université de Columbia à New York), d’un DESS en Gestion de la Construction et Aménagement Urbain commun à la Sorbonne et à l’Ecole des Ponts et Chaussées de Paris et d’une Maîtrise en Economie à l’Université de la Sorbonne à Paris.

En outre, il a reçu deux Doctorats Honoris Causa, respectivement de la European Business School of Geneva, Suisse (juin 2016) et du American University of Europe / Fon, Macédoine du Nord (janvier 2020).

Pourquoi est-il incontournable pour la Transition en cours ?

« Nous voulons d’un Premier ministre guinéen. C’est-à-dire qui nous connait, qu’il soit un homme du sérail, parfait connaisseur de notre administration. Surtout, il ne doit pas être un grand bavard. Il se doit d’être bosseur et hyper efficace » déclare Thierno Madiou, activiste de la société civile guinéenne depuis plus de 15 ans.

« Le prochain Premier ministre doit être un parfait connaisseur des rouages politiques. Je dis ça parce que je suppose que le Colonel ne s’y connait pas trop. Et mieux, il doit aussi être un produit de l’école guinéenne mais dont l’intégrité est perçue comme irréprochable au sein de l’opinion » enchaine Thalès, politologue, communicant et activiste politique.

De toute évidence, les guinéens semblent exigeants sur le profil et l’identité du prochain Premier ministre de la transition. Pas que, les nouvelles autorités en sont, elles aussi, tout à fait conscientes.

Dans la Charte de la Transition, publiée le 27 septembre 2021, les membres du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) avec leur tête le jeune colonel Mamadi Doumbouya ont apporté des précisions claires sur ce qui devrait être le profil du prochain Premier ministre.

« Le Premier ministre est une personnalité civile reconnue pour ses convictions, ses compétences avérées et sa probité morale » dispose l’article 49 de la Charte de la Transition guinéenne.

« En analysant cette disposition, on a comme l’impression que la junte sait ce qu’elle veut. L’étau se resserre autour des entrepreneurs politiques pour faire place aux hommes compétents » affirme Moise Camara. Et d’ajouter « Oui, je suis tout oui avec vous. Le Ministre Abdoulaye Yéro joue effectivement dans la loge des cadres guinéens ayant une réputation d’homme intègre et compétent. Il a la réputation de ne point transiger quand il s’agit de défendre ses convictions. Même face à son mentor Alpha, il n’a pas rechigné. ».

« Donc oui, il y’a un meilleur profil comme très peu de cadres encore une fois. Ces critères s’imposent aussi aux nouvelles autorités du CNRD à qui la Charte s’impose en 1er. » a-t-il renchéri.

Toutefois, s’il convient de préciser que le choix du prochain Premier ministre de la Transition peut ne pas porter sur la personne d’Abdoulaye Yéro Baldé, puisque cela relève de la discrétion du Chef de l’Etat, tout porte à croire cependant que le destin de l’homme semble être scellé.

Politiquement, il pourrait rebondir au sein de sa famille. Le RPG. Parti dans lequel, il a plus de trente années de militantisme politique à son actif, auprès de son mentor, Alpha Condé.

Bien que maints cadres du RPG lui avaient auparavant taxé de traitre pour avoir rendu le tablier. Cette démission, il faut le préciser, faisait suite au projet machiavélique de 3ème mandat porté par le Président Alpha Condé, Chef de l’Etat d’alors.

A ce propos, le Ministre Baldé avait indiqué avoir averti le Président Condé de sa volonté de ne plus continuer à assumer ses fonctions de membre du gouvernement.

« Suite à notre entretien de cet après-midi, et comme je vous l’avais signifié, je ne souhaite plus continuer à assumer mes fonctions au sein du gouvernement » avait-il écrit.

Poursuivant, il a motivé sa lettre par la fragilisation du tissu social, le manque de sérénité dans le fonctionnement de l’Etat, l’incrédibilité des actes de l’Etat, l’existence d’un environnement, délétère, non favorable à la conduite des affaires de l’Etat dans l’intérêt des populations. Alors qu’en son sein, des valeurs sûres, capables de porter les couleurs du parti dans le cadre d’une alternance démocratique, ont su émerger du RPG; a-t-on lu dans sa lettre, en date du 27 février 2020, adressé au Président de la République.

Comme le dit cet adage, ‘’ si vous êtes certains d’avoir raison, vous n’avez pas à vous soucier de ce que les autres pensent’’. Ce fut exactement le cas du Ministre Yéro Baldé.

Nombreux étaient ces militants de la 25ème heure qui lui ont taxé de traite. Chose à laquelle, il n’a jamais répondu, nous apprends-t-on.

Moins de deux ans après sa démission, l’histoire lui a donné raison. Ses craintes ont pris forme, et le RPG agonise. Aujourd’hui, la douleur est telle que, désormais, nombreux sont ces stratèges du parti qui postulent une remontée en surface avec un homme qui fait quasiment l’unanimité.

Leur dévolu serait lancé sur le natif de Tougué, Abdoulaye Yéro Baldé. De l’avis de moult jeunes du RPG, il fait partie de cette short liste composée de cadres compétents et intègres dont la mission consiste à porter le flambeau arraché des mains d’Alpha Condé.

D’un point de vue stratégique ou de sociologie appliquée à de la réal politique, il faut dire que ce choix est tout à fait intelligible. Ce, pour maintes raisons.

D’abord, parce que nul ne conteste son engagement et la force de ses convictions pour un RPG résilient. Ensuite, il fait partie de ceux-là qui peuvent clamer avoir des mains propres, même après une décennie de participation effective à un régime « corrompu ». En fin, d’autres mettent en avant la valeur ajoutée que pourrait apporter son identité ethnique.

Le fait que monsieur Baldé provienne du Foutah (bastion de l’opposant principal à Alpha Condé, ndlr) ne serait pas anodin. Surtout dans un contexte où la reconquête de la Haute, Basse Guinée et de la Guinée du Sud pourrait s’avérer relativement faisable suivant le mécanisme des alliances propres aux stratèges du RPG, la conquête du Foutah ne pourrait , quant à elle, se réaliser qu’avec un homme qui à l’écoute et le respect des populations de la région.

Ainsi, vendre un RPG transversal, parti d’espèce Maninka-phone porté par un peul de souche, serait une stratégie des plus spectaculaires à l’effet de galvaniser un RPG moribond face à un peuple impatient de réconciliation et de progrès « garantis ».

La pertinence de cette stratégie résiderait dans la personnalité même d’Abdoulaye Yéro Baldé qui, en prélude aux crises ethniques sous fond de conflits intercommunautaires, avec sa lucidité et son recul, pourrait calmer le jeu et s’élever au-dessus des mêlées politiciennes.

Pris, hier, pour traître par les militants RPG de la 25ème, force est aujourd’hui de reconnaître que celui qui fut présenté par l’ancien Premier ministre, Ibrahima Kassory Fofana, comme l’un des meilleurs Ministres du Gouvernement, est à la croisée des chemins.

Entre la Primature d’une transition qui s’annonce mouvementée et le recalibrage d’un parti à l’agonie, l’avenir du « jeune » cinquantenaire, natif du Foutah, vacille désormais au gré des enjeux et défis d’une Guinée en quête de refondation.

A suivre !

CHERIF HAIDARA

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