Situation des droits humains dans le monde: le rapport d’amnesty  2021 publié

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L e rapport d’Amnesty International sur la situation des droits humains dans le monde en 2021, publié en mars 2022, montre que les promesses de « reconstruire en mieux » après la pandémie de COVID-19 se sont révélées creuses.

En Guinée, note le rapport, des dizaines de personnes arrêtées arbitrairement dans le cadre des manifestations de 2020 contre la candidature de l’ancien président Alpha Condé et sa réélection pour un troisième mandat ont été libérées. Plusieurs personnes ont été tuées lors de mouvements de protestation relatifs à des enjeux autour de l’exploitation minière. Personne n’a été traduit en justice pour le massacre du 28 septembre 2009. Les violences sexuelles persistaient.

Contexte sur le cas spécifique de la Guinée

Après l’arrestation d’Alpha Condé le 5 septembre à l’issue d’une offensive menée par les forces spéciales guinéennes, le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), dirigé par Mamadi Doumbouya, a abrogé la Constitution et dissous le gouvernement. La rédaction d’une nouvelle Constitution et l’organisation d’élections ont été annoncées dans une Charte de la transition publiée le 27 septembre. Mamadi Doumbouya a été investi à la présidence devant la Cour suprême le 1er octobre. Après 12 semaines de détention sans inculpation officielle, Alpha Condé a été autorisé à résider chez son épouse.

La flambée de la maladie à virus Ebola qui avait commencé mi-février a été déclarée officiellement terminée en juin. Le couvre-feu instauré pour lutter contre la pandémie de COVID-19 a été levé le 21 octobre.

Détention arbitraire

Après avoir été maintenus plusieurs mois en détention arbitraire, des dizaines de membres et sympathisant·e·s de l’opposition et de militant·e·s de la société civile qui avaient dénoncé la candidature et/ou la réélection de l’ancien président Alpha Condé pour un troisième mandat ont été libérés.

Le 8 mai, plus de 40 personnes ayant appelé à manifester ou participé à des manifestations en 2020 contre la candidature d’Alpha Condé ou sa réélection pour un troisième mandat ont été remises en liberté après l’abandon des charges retenues contre elles. Le 7 septembre, sur ordre du CNRD, 79 militant·e·s et membres et sympathisant·e·s de l’opposition qui avaient également été arrêtés ont été libérés. Parmi ces personnes figurait Oumar Sylla, l’un des dirigeants du Front national pour la défense de la Constitution, qui avait été condamné le 28 janvier à 11 mois de prison pour « participation délictueuse à un attroupement susceptible de troubler l’ordre public ». Il était détenu à la maison centrale de Conakry depuis son arrestation le 29 septembre 2020, durant la mobilisation contre la candidature d’Alpha Condé à un troisième mandat. Le 10 juin, dans une autre affaire, la cour d’appel de Conakry avait condamné Oumar Sylla à trois ans de prison pour « communication et divulgation de fausses informations et menaces notamment de violences ou de mort » après une déclaration à la radio dans laquelle il avait dénoncé des arrestations arbitraires.

Amadou Diouldé Diallo, journaliste pour la chaîne de service public Radio Télévision guinéenne, a passé près de trois mois en détention provisoire pour outrage au président de l’époque, Alpha Condé. Il a été libéré le 19 mai après avoir été condamné par un tribunal de Conakry à payer une amende de cinq millions de francs guinéens (420 euros) pour « outrage au chef de l’État ».

Recours excessif à la force et liberté de réunion

Plusieurs personnes auraient été tuées par les forces de défense et de sécurité dans au moins trois localités au cours de manifestations relatives à des enjeux d’exploitation minière, dont certaines ont dégénéré.

Le 22 avril, les forces de défense et de sécurité ont abattu au moins deux personnes et fait plusieurs blessés à Kouroussa, dans la région de Kankan, après l’attaque par une foule en colère de la mairie et de la résidence du préfet, sur fond de conflit latent entre les petits orpailleurs et une compagnie minière au sujet de l’exploitation d’une zone aurifère.

Le 22 juin, à Gaoual, dans la région de Boké, au moins deux personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées lors du déploiement de l’armée pour contrôler des manifestations et des émeutes contre la participation présumée de membres des forces de défense et de sécurité à la gestion des mines d’or artisanales. D’après des témoins, des soldats ont intentionnellement frappé et fait tomber d’un pont l’une des deux victimes.

En juillet, dans la région de Siguiri, des personnes ont tiré sur des gendarmes qui étaient venus faire appliquer une décision de justice relative à un conflit entre deux villages concernant l’exploitation d’une mine artisanale. Les auteurs des tirs seraient des Donzos (chasseurs traditionnels). Treize gendarmes ont été blessés, selon les autorités.

Le 17 août, à Foulata, dans la région de Kankan, les forces de défense et de sécurité auraient blessé par balle plusieurs personnes et incendié des maisons et des commerces, après des manifestations contre une compagnie minière qui n’aurait pas honoré son engagement d’employer des habitant·e·s locaux.

Le 11 septembre, le CNRD a interdit toutes les manifestations jusqu’à nouvel ordre.

Conditions de détention inhumaines

Mamadou Oury Barry, qui était en détention provisoire à la maison centrale de Conakry depuis le 5 août 2020 pour « coups et blessures volontaires », est mort le 16 janvier. D’après le ministère de la Justice, il est décédé à l’hôpital d’une « mort naturelle liée à une occlusion intestinale et une anémie bioclinique ». Le ministère public n’a autorisé que le corps soit remis à la famille que le 2 février, après une demande en ce sens formulée par un avocat le 19 janvier. Les semaines précédentes, trois autres détenus, dont des sympathisants du parti d’opposition Union des forces démocratiques de Guinée, sont morts peu après la libération de l’un d’entre eux et l’hospitalisation des deux autres dans un état de santé catastrophique. Les autorités ont attribué ces décès à des causes naturelles sans mener d’enquêtes approfondies. Les familles des détenus n’avaient pas pu leur rendre visite en prison ni à l’hôpital.

Peine de mort

Bien que la peine de mort ait été supprimée du Code pénal en 2016, plusieurs prisonniers étaient toujours sous le coup d’une condamnation à mort, dont certaines avaient été prononcées en 2011 après des affrontements interethniques à Galakpaye, dans la région de Nzérékoré.

Impunité

Malgré plusieurs annonces d’enquêtes sur les homicides de manifestant·e·s commis en 2019 et 2020 pendant les manifestations contre le changement de Constitution et l’élection de l’ancien président Alpha Condé à un troisième mandat, très peu d’informations étaient disponibles à la fin de l’année. En juin, le ministre de la Justice a indiqué que le tribunal de première instance de Mamou avait acquitté, faute de preuves, les personnes accusées de l’homicide d’un homme de 20 ans le 22 mars 2020 à Kégnéko, dans la région de Mamou. Le 23 octobre, une délégation du CNRD a rencontré les familles des victimes tuées par les forces de défense et de sécurité sous le régime d’Alpha Condé, leur affirmant qu’elles obtiendraient justice.

Douze ans après la mort de 157 personnes tuées par les forces de défense et de sécurité le 28 septembre 2009 dans un stade de Conakry, où plus de 100 personnes avaient également été victimes de violences sexuelles, le procès n’avait toujours pas commencé, alors que l’enquête était close depuis novembre 2017.

Violences faites aux femmes et aux filles

L’Office de protection du genre, de l’enfance et des mœurs avait enregistré 331 cas de viol mi-décembre, contre 393 cas en 2019 et 374 en 2020. En dépit des efforts déployés ces dernières années par les autorités et les ONG en faveur de l’accès à la justice pour les victimes de violences sexuelles, les procédures judiciaires étaient toujours entravées par la pratique consistant à négocier des arrangements en marge des tribunaux entre le responsable présumé et la victime1.

Droit à la santé

La campagne de vaccination anti-COVID-19 a été lancée le 5 mars. Elle était principalement destinée au personnel de santé, aux personnes de plus de 60 ans, aux personnes occupant des emplois stratégiques et aux dignitaires religieux.

Le 10 août, le président Alpha Condé a ordonné au gouvernement de veiller à ce que tous les fonctionnaires soient vaccinés. Au 29 décembre, d’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire, 1 983 124 personnes avaient reçu leur première dose et 911 780 les deux doses (sur une population totale estimée à environ 13 millions).

Retrouvez ici l’intégralité dudit rapport

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