Route dabiss–guinée-bissau : l’espoir d’un pont face au calvaire du désenclavement

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L e chantier de bitumage de la route Dabiss–frontière Guinée-Bissau, un maillon crucial du corridor transafricain Dakar–Lagos, avance à grands pas, a-t-on appris des sources locales.

Financé par la Banque africaine de développement (BAD) et l’Union européenne (UE), ce projet suscite de grands espoirs dans la région de Boké. Mais pour les populations riveraines, l’attente d’un pont sur le fleuve Cogon, en remplacement du bac en panne depuis 2023, se transforme en une épreuve quotidienne mêlant isolement, pertes économiques et désarroi social.

Un projet régional d’envergure, pilier de l’intégration ouest-africaine

Évalué à près de 160 milliards de francs guinéens (GNF), le projet s’inscrit dans la stratégie européenne Global Gateway et dans la politique d’intégration régionale de la CEDEAO.

Le financement, combinant dons et prêts de l’UE et de la BAD, vise à achever le tronçon de 41 kilomètres reliant Dabiss (région de Boké) à Québo (en Guinée-Bissau).

Au-delà du bitumage, l’un des volets les plus attendus reste la construction d’un pont de 255 mètres sur le fleuve Cogon, censé remplacer le bac de traversée hors service depuis mars 2023.

Depuis cette panne, la circulation est paralysée, transformant cet axe stratégique en goulot d’étranglement et ralentissant considérablement les échanges commerciaux entre les deux pays.

Ce tronçon s’intègre dans le corridor Boké–Québo, lui-même partie de la Route transafricaine n°3 (RN3). Il fait partie des trois grandes initiatives régionales financées par l’UE à hauteur de 92 millions d’euros, aux côtés des routes Coyah–Farmoreya (vers la Sierra Leone) et du projet d’interconnexion électrique Guinée–Mali.

Suivi Rigoureux des Partenaires et Engagement du Contractant

Les travaux ont été confiés à la société China Railway Seventh Group (CRSG), un géant du génie civil déjà présent sur plusieurs chantiers en Afrique de l’Ouest.

« Nous mettrons tout en œuvre pour partager notre expertise avec le peuple de Guinée et livrer un ouvrage durable », avait promis Wang Guangchao, directeur général de l’entreprise, lors du lancement officiel des travaux.

Pour s’assurer du respect des engagements, une mission conjointe UE–BAD s’est rendue sur le terrain début novembre 2025. Elle a évalué l’avancement des travaux, la mise en œuvre du plan de gestion environnementale et sociale (conformément au rapport EER d’avril 2025 de la BAD), ainsi que le processus d’indemnisation des populations affectées par le projet.

Des villages coupés du monde et une économie à genoux

Sur le terrain, la promesse de désenclavement se heurte à une réalité bien plus dure. Depuis la panne du bac, les habitants de Dabiss et des localités environnantes vivent pratiquement coupés du reste du pays. Les pistes de contournement, souvent boueuses et accidentées, rendent tout déplacement périlleux, notamment en saison des pluies.

« Depuis que le bac est tombé en panne, nous vivons comme isolés. Même pour évacuer un malade ou transporter nos marchandises, c’est un combat de chaque jour », confie Ousmane Baldé, commerçant de Dabiss.

L’impact économique est dévastateur. Les commerçants, agriculteurs et transporteurs voient leurs revenus s’effondrer. Les produits agricoles, halieutiques et vivriers pourrissent parfois avant d’atteindre les marchés hebdomadaires.

« Avant, je faisais deux traversées par semaine pour vendre mes poissons à Boké. Aujourd’hui, je perds presque la moitié de mes produits. J’ai dû licencier deux apprentis faute de revenus », déplore une mareyeuse installée sur la rive du Cogon.

Les marchés locaux se vident, les prix flambent, et le désenclavement promis tarde à devenir une réalité tangible.

Un appel pressant à des solutions d’urgence

Malgré les progrès visibles sur le chantier, les populations locales réclament des mesures transitoires pour atténuer leurs souffrances. La mise en place d’une passerelle provisoire ou d’un bac de secours figure parmi les doléances les plus urgentes.

Si l’espoir d’un pont moderne et durable demeure, les habitants de Dabiss rappellent que le désenclavement n’attend pas.

« Nous remercions les partenaires pour leurs efforts, mais nous demandons une solution rapide. Nos vies économiques ne peuvent pas être suspendues jusqu’à la fin du projet », plaide un transporteur joint par notre rédaction. .

En attendant que le pont du Cogon relie à nouveau les deux rives, c’est toute une économie locale qui reste en souffrance, suspendue entre promesse d’intégration et réalité d’isolement.

Fatoumata Camara pour www.guineeactuelle.com 

 

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