Manéya : quand le drame rappelle aux journalistes leur responsabilité sociale

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L e drame de l’éboulement survenu dans la nuit du 20 août à Manéyah, en périphérie de Conakry, endeuille une nouvelle fois des familles et interpelle toute la nation. Mais au-delà de la tragédie humaine, il soulève la question sur la responsabilité des journalistes dans le traitement de tels événements.

L’information est un droit. Les faits doivent être connus, partagés, analysés. Mais la manière de le faire importe tout autant que le contenu. Dans un moment où des pères pleurent leurs enfants, des mères cherchent encore des proches sous les décombres, le rôle du journaliste ne peut se limiter à tendre un micro au premier témoin en larmes. C’est là que la responsabilité sociale du métier prend tout son sens.

Aujourd’hui, la facilité des directs sur les réseaux sociaux a bouleversé les pratiques. Tout est filmé, tout est diffusé immédiatement, sans recul, sans filtre. Cette spontanéité plaît au public, mais expose à des dérives. Un direct n’est pas une simple improvisation, il se prépare, il s’encadre, il se pense. Car l’information brute, livrée sans traitement, peut blesser, choquer ou même nuire à ceux qui en sont les victimes.

Face à un drame comme celui de Manéah, l’essentiel n’est pas de montrer des larmes ou de diffuser des cris de douleur. L’essentiel est de donner à comprendre. Ce rôle incombe à des voix expertes (un secouriste, qui explique la difficulté des recherches ; un médecin, qui décrit la gravité des blessures ; un géologue, qui analyse les causes de l’éboulement ; ou encore un administrateur local, qui parle des permis de construire et des risques d’urbanisation incontrôlée). Ce sont ces éclairages qui élèvent l’information et la mettent au service de l’intérêt général.

Un drame humain n’est pas un spectacle. Il ne doit pas être traité comme un concert ou un match de football retransmis en direct. Le journalisme, dans ces circonstances, doit être empreint de dignité, de mesure et de responsabilité.

A l’heure où la liberté de la presse reste fragile en Guinée, les journalistes ont d’autant plus le devoir de montrer qu’ils savent conjuguer liberté et responsabilité. Nombreux sont déjà ceux qui accomplissent leur mission avec rigueur et respect. Mais il est temps que cette exigence devienne la règle, et non l’exception.

Paix aux âmes perdues. Courage aux familles. Et aux journalistes, rappelons-le, notre métier est exaltant. Valorisons-le, en donnant le meilleur de nous-mêmes, surtout dans ces moments où la société a besoin d’information, mais aussi de pudeur et d’humanité.

Alpha Binta Diallo 

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