L e président du parti Panafricain de Guinée (PAG), Elhadj Mohamed Mansour KABA, unique candidat à la toute première élection présidentielle de décembre 1993, encore en activité en Guinée, a animé une conférence de presse, samedi 14 septembre 2024, à Conakry, pour donner son avis sur le l’avant-projet de nouvelle Constitution élaboré par le Conseil National de la Transition (CNT), a-t-on appris.
En prenant la parole face à un parterre de journalistes, ce doyen de la politique guinéenne a formulé un certain nombre de critiques sur ce document que le CNT présente actuellement aux diverses organisations socio-politiques du pays.
Au prime abord, Elhadj Mohamed Mansour Kaba évoque l’absence d’un préambule dans cet avant-projet, qui, selon lui, devrait signaler ce que nous sommes aujourd’hui et où nous voulons aller demain.
“Les auteurs du projet de Constitution de la République de Guinée semblent proposer au Peuple de Guinée un projet de constitution qui relève de l’An 1 de la République de Guinée, c’est-à-dire octobre 1956, sans aucune considération pour les années antérieures. Le préambule devrait signaler ce que nous sommes aujourd’hui et où nous voulons aller demain”, regrette-t-il.
Or, indique Elhadj Mansour Kaba, l’Etat guinéen est dans sa soixante-sixième année d’existence ayant connu plusieurs constitutions ou Lois fondamentales, d’où l’impérieuse nécessité d’évoquer dans un préambule les conditions de refondation de l’Etat guinéen selon le CNRD après sa prise du pouvoir le 5 septembre 2021.
“Il s’agit de rappeler dans ce préambule les garanties promises selon lesquelles ni le Président de la Transition, ni aucun membre du CNRD, du gouvernement et du CNT ne pourra être candidat aux diverses élections qui mettront fin à la Transition. Ces principes ont également été retenus par la CEDEAO. Toute négligence de cette obligation devra être considérée comme une porte ouverte à la trahison des engagements initiaux des responsables de la Transition. Tout le monde est témoin de ce qui est arrivé à l’équipe de Moussa Dadis Camara dans un cas semblable”, a-t-il précisé.
Ensuite , le président du parti Panafricain de Guinée dénonce ce qu’il qualifie de discrimination sur la base de l’âge des candidats aux différentes élections constatée dans l’avant-projet projet de Nouvelle Constitution.
Selon lui, l’avant-projet de constitution du CNT introduit une discrimination par l’âge des candidats aussi bien pour les jeunes âgés de moins de 35 ans que pour les vielles personnes âgées de plus de 80 ans.
“Cette discrimination est intolerable car elle retire aux citoyens la liberté de voter pour les candidats de leurs choix Le rôle d’une Constitution n’est pas d’organiser cette discrimination arbitraire et attentatoire aux droits fondamentaux des citoyens guinéens. Il faudra fixer des conditions draconiennes de santé mentale et physique, de probité morale ainsi que d’autres conditions financières pour les candidatures aux différentes élections communales, municipales législatives et présidentielles. Mais il faut laisser aux citoyennes et aux citoyens le libre choix en matière de candidature et d’élection. On ne fait pas une constitution pour régler des comptes”, propose-t-il.
Parlant de la candidature libre introduite dans ce document, M. Kaba relève une certaine contradiction entre le CNT et le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD) qui a mené des enquêtes minutieuses et exigeantes sur les partis politiques en République de Guinée.
“On a l’impression que le CNT et le MATD ne se concertent nullement pas pour s’entendre sur le rôle des partis politiques en République de Guinée. Ainsi la main gauche de l’Etat ne sait pas ce que fait la main droite(…). Avec les grands projets miniers qui sont en cours de réalisation dans notre pays, la candidature à l’élection présidentielle ne doit en aucun cas être autorisée pour des individus incontrolables et incontrôlés, même si certains partis politiques sont dirigés par des leaders à la recherche d’un poste de président d’organisations politiques, ceux-ci finissent tout de même par agir sur le terrain et se faire connaître avec le temps. Mais un candidat libre sorti de l’ombre du jour au lendemain ne peut être comparable à un candidat présenté par un parti politique fonctionnant légalement et dans la durée. Avec l’autorisation des candidatures libres, notre pays sera livré à des groupes mafieux qui utiliseront des chevaux de Troie dociles et apatrides. Ce sera le meilleur moyen de chasser les investisseurs dont notre pays a un besoin vital”, estime Elhadj Mohamed Mansour Kaba.
Par ailleurs, le président du parti Panafricain de Guinée (PAG), s’interroge sur ce qu’il faudra faire en cas de rejet de cette Constitution.
“Le CNT devra prévoir le cas du rejet majoritaire de la Constitution sous sa forme actuelle. On a beau vouloir minimiser le rôle des partis politiques dans les prises de décision dans notre pays, il est évident que si un nombre important de partis politiques rejette le projet de constitution du CNT, le référendum sera un fiasco retentissant. Il faudra alors se poser la question: que faire alors”, s’interroge-t-il.
Alpha Ibn Boubacar Diallo