L’armée, catalyseur de la démocratie ?

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De par leur nature et depuis leur création, les armées constituent les forces vives et vitales sur lesquelles il faille compter quant à la sauvegarde de l’intégrité territoriale des Etats et la sécurité des populations qui les habitent.

Cependant, au fil de l’histoire, certaines forces de défense se sont immixées dans la gestion politique de leur pays. D’aucunes par effraction, d’autres parce qu’elles y étaient obligées. Cette tendance fait-elle de l’armée la vraie garante de la démocratie dans nos Etats ou le support de la dictature ?

La grande muette, comme on la surnomme, ne serait pas aussi muette qu’on le pense. Les forces de défense occupent une place capitale dans le développement d’un pays. Comment prospérer dans l’insécurité ? Est-il possible de se concentrer sur son développement lorsqu’on n’est pas sûr de ses arrières ? Non.

Cet aspect indispensable de la vie des Etats et des nations confère à l’armée une place prépondérante au sein de l’appareil étatique dans la quasi-totalité des pays du monde. Etant l’entité la plus structurée et la plus hiérarchisée, l’armée est le reflet de toutes les sensibilités du pays et concentre en elle toutes les compétences humaines des autres sociétés. Les meilleurs ingénieurs, les meilleurs instructeurs, pour ne citer que ceci, font partie ou ont fait partie de l’armée.  Les hopitaux et les laboratoires militaires sont les références en matière de traitement et de recherche. Elle est la mieux lotie également dans la réparation des ressources budgétaires d’un Etat et une bonne partie de ses données (effectif, budget, matériels…) relèvent du domaine de l’insondable. Elle détient sa loi (loi martiale) et ses propres juridictions. Toutes ces caractéristiques et ces privilèges ont pourtant un revers pour l’armée : elle doit rester le plus loin possible de la gestion politique de son pays. Lorsqu’elle s’y invite, c’est un putsch, un coup d’Etat, une effraction.

Pourtant, nul n’ignore que hormis le peuple, le vrai pouvoir dans un pays est détenu par l’armée et rare sont les Etats qui échappent à cette réalité. Ce pouvoir s’exerce différemment en fonction des réalités et de la spécificité des Etats.

Aux Etats-Unis, le lobby militaro-industriel est à la base de la politique étrangère de plusieurs présidents, notamment républicains. Dans les grandes démocraties, a l’abri des regards et surtout de la presse, l’armée exerce une grande influence sur les décisions politiques. Car en effet, l’Institution militaire concentre en elle des enjeux importants liés à l’emploi ou au fonctionnement des grandes firmes, fer de lance de l’expression de puissance de ces Etats. Israël n’a pas une armée puisqu’il est une armée.

En Afrique, l’arme égyptienne se confond a l’Etat égyptien tellement que l’Institution est puissante.

En ce début 2019, les bérets se sont invités dans les chaos politiques de deux Etats africains, prouvant à suffisance que les hommes en costume et cravates ou en …habit africain ne sont rien sans le soutien des hommes en treillis et de leurs kalachnikovs.

L’Algérie et le Soudan sont tous les deux de grands Etats disposant de vastes et étendus territoires et surtout des ressources très prisées : le pétrole pour le Soudan, le pétrole et le gaz pour le pays de Bouteflika. Les revenus issus de la vente de ses rentes ont enrichi d’autre part une élite clanique qui a fini par mettre main basse sur la richesse de ces pays.

Officier de l’armée soudanaise Omar El Béchir, arrive au pouvoir en 1989 après un coup d’Etat. Il se livre alors dans des guerres fratricides avec le Sud-Soudan et le Darfour, deux régions sécessionnistes de son pays. Durant 3 décennies, il a bénéficié du soutien de l’armée pendant que les Soudanais subissaient le martyr et le four au Darfour. Mais comme un déclic, la grande muette a assouvi le désir ardent du peuple soudanais en renversant le Chef de l’Etat qu’ils ont alors soutenu pendant 30 ans. Mieux, elle l’a mis au frais en attendant peut-être la CPI qui cherche la tête de Omar depuis belle lurette.

La clique mafieuse qui avait mis main basse sur l’Algérie est entrain d’être démantelée par cette armée même qui avait cautionnée toutes ces bévues sur le peuple algérien jusqu’à ce 10 avril 2019 ou le Chef d’état major général des armées a dit stop. Dans ce pays, c’est l’armée qui a son Etat et pas le contraire.  Depuis cette sortie de Gaid Sallah, les choses sont allées plus rapidement et on connait la suite. Même si cela ne semble pas satisfaire pour le moment les populations, ils prouvent encore une fois que le vrai pouvoir n’est pas au Palais mais dans les casernes.

Mamadou Tandja voulait modifier la constitution du Niger après deux mandats successifs. Malgré les conseils et les mises en garde de la CEDEAO et de la fameuse communauté internationale, il s’est entêté. L’armée, en toute responsabilité, a déclenché un putsch qui a conduit à une transition apaisée et à l’élection de Mahamadou Issoufou, ami d’un certain Alpha Condé.

Au Venezuela, l’armée se fait draguer d’une part par l’opposant Juan Guaido et se fait rappeler à l’ordre Républicain par Nicolas Maduro.

Les exemples ne finissent pas mais tout observateur averti sait que la colonne vertébrale d’un régime aussi sadique soit-il reste l’armée. Elle est non seulement la garante de l’intégrité territoriale d’un pays, mais aussi et surtout elle reste le socle de l’encrage démocratique dans un pays.

A elle de faire son choix !

Alpha Oumar DIALLO

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