Usage d’armes par les gendarmes guinéens : human rights watch et amnesty inquiets 

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L ‘Assemblée nationale a adopté le 25 juin 2019, un projet de loi relative à l’usage des armes par la gendarmerie. Cette loi établit plusieurs justifications de l’usage de la force, notamment pour défendre des positions occupées par les gendarmes, si une vie d’un citoyen ou d’un gendarme est menacée ou encore sévir contre les coupeurs de route ou lutter contre les terroristes. Même que cette loi ne remplace pas celle sur le maintien d’ordre laquelle interdit l’utilisation d’arme à feu, sauf en cas d’absolue nécessité.

Cependant, ces arguments du ministère de la Défense, porteur de la loi ne rassurent pas les défenseurs des droits humains, partisans de la non-violence. Human Rights Watch et Amnesty International ont conjointement exprimé leur inquiétude, face à cette loi et ont invité le Président Alpha Condé à ne pas promulguer la loi.

« Le président guinéen ne devrait pas mettre en application une loi nouvelle qui donne aux gendarmes le pouvoir discrétionnaire de décider de recourir aux armes à feu et pourrait les mettre à l’abri de toute éventuelle poursuite en justice pour meurtre illégal. Il devrait inviter l’Assemblée nationale à réviser cette loi, afin de la mettre en conformité avec les obligations de la Guinée aux termes du droit international et du droit africain en matière de droits humains. Alors que la tension politique monte à l’approche de l’élection présidentielle de 2020, la dernière chose dont la Guinée a besoin est une loi « aux termes vagues qui semble donner aux gendarmes le pouvoir discrétionnaire de décider de recourir à la force létale », a déclaré Corinne Dufka, directrice pour l’Afrique de l’Ouest à Human Rights Watch.

En réponse, le directeur de l’information et des relations publiques des forces armées guinéennes, Aladji Cellou Camara affirme que la loi n’était pas destinée à remplacer la loi de 2015 sur le maintien de l’ordre public, mais toutes deux stipulent que la force ne doit être utilisée que lorsque c’est nécessaire et qu’elle doit être proportionnée, elles ne limitent pas explicitement le recours aux armes à feu aux cas où existent des menaces imminentes de mort ou de grave blessure.

Pour justifier sa thèse,  M. Camara soutient que, quel que soit le cadre juridique, les agents de police et de gendarmerie ne sont jamais armés lorsqu’ils assurent la canalisation de manifestations de rue.

Cependant, notent les organisations, la Guinée a une longue habitude d’utilisation ‘’excessive des armes à feu par les forces de sécurité lors des manifestations. De nombreux manifestants, ainsi que plusieurs membres des forces de sécurité, ont été tués, la plupart par des tirs d’armes à feu. Au moins 12 personnes ont été tuées, dont six par des tirs d’armes à feu, et de nombreuses autres ont été blessées, à l’approche et à la suite de l’élection présidentielle de 2015. Au moins, 21 personnes sont mortes lors de manifestations en 2018, dont au moins 12 auraient été victimes de tirs mortels de la part des forces de sécurité d’une part, et un agent de police et un gendarme tués par des manifestants d’autre part.

Si la Guinée connaît un nouveau cycle de manifestations violentes au cours des derniers mois, les organisations redoutent que le gouvernement les qualifie de menace à la sécurité et les réprime.

« Ce n’est pas le moment d’affaiblir les règles d’opération des forces de sécurité. Le gouvernement guinéen devrait plutôt renforcer sa capacité à enquêter effectivement sur les allégations de mauvais comportements de la part des membres de ses forces de sécurité et à poursuivre leurs auteurs en justice », a souhaité Francois Patuel, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.

Rappelons que les députés de l’opposition n’avaient pas voté la loi qui donne carte blanche aux forces de l’ordre de tirer, alors que les assassinats lors des manifestations ne sont pas élucidés.

Hafia Diallo

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