Tribune : quelle leçon l’afrique doit tirer du déboulonnement des statues négrières et coloniales?

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Un acte anti historique est un acte qui va dans le sens du déni de l’histoire d’un peuple en foulant au sol les moments de gloire et en récompensant les personnages négatifs. C’est pourquoi, le français Sarkozy avait dit que l’Africain n’est pas entré dans l’histoire. Cela avait choqué beaucoup d’africains et d’africanistes.

Mais comment voudrions nous qu’on nous respecte si nous n’avons aucune considération pour notre propre histoire et si nous considérons que l’histoire de l’Afrique ne commence qu’avec la rencontre du colon ? J’ai trois exemples concrets d’actes anti historiques posés dans 3 pays africains différents :

Au Mali:

Lors de la commémoration du centenaire du palais présidentiel de Koulouba, le régime ATT (Amadou Toumani Touré, NDLR) a fait appel aux descendants du général français Trentignan, l’un des conquérants de ce territoire, pour les honorer en 2006 à Bamako. C’est le général Trentignan qui avait jugé et condamné le résistant Samory Touré dans une parodie judiciaire à Kaye.

Plus d’un siècle plus tard, son buste est inauguré au palais Koulouba et ses descendants font l’objet de tous les honneurs sans compter que le Mali n’avait pas d’autres héros à célébrer.

Au Congo Brazzaville : L’explorateur italien naturalisé français Pierre Savorgnan de Brazza qui a jeté les bases de la colonisation française au Congo dont la capitale Brazzaville porte le nom qu’avait sa tombe en Algérie. Ce sont les dirigeants du Congo-Brazzaville qui ont mené toutes les démarches nécessaires auprès des autorités italiennes, françaises et de sa famille biologique pour rapatrier sa tombe et ont construit un mausolée à sa gloire à Brazzaville.

En Guinée, il y a 4 ans, une association a érigé à l’honneur de René Caillé, une statue à Kouroussa, la ville du célèbre écrivain guinéen Camara Laye, dans un monument situé à un carrefour important de la ville. Comme si Kouroussa, jadis territoire du Hamana, ayant appartenu à l’empire du Mali et possédant un dynamisme culturel, n’avait pas de héros à honorer.

Conclusion: Comment voudrions nous transmettre la fierté à la future génération si en Afrique, on inverse les valeurs ? Aucune nation n’accepterait de célébrer ses bourreaux étrangers sauf nous africains. Donc c’est bon de saluer le déboulonnement des statues coloniales et négrières en Europe et en Amérique à la suite du scandale Georges Floyd, mais il est meilleur de lutter contre l’aliénation et le manque de confiance en soi en Afrique.

Nafadji Sory CONDE

Socio-anthropologue et historien

Promoteur des langues nationales

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