L’excision : le crime continue, la lutte aussi.

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E n cette période de grandes vacances, il n’est pas rare de voir à travers la ville de Conakry et celles de l’intérieur du pays, des jeunes filles habillées en habits traditionnels et accompagnées par des femmes plus âgées. Ce groupe exclusivement féminin et facilement reconnaissable par leur allure traditionnelle est composé d’exciseuses, d’excisées et de leurs accompagnateurs. En effet, c’est pendant les vacances scolaires que certaines familles profitent pour exciser leurs filles. Si chez d’aucuns, les parents biologiques sont consentants, chez d’autres ils ne le sont pas du tout ou encore seul le père y est opposé. La fille est alors excisée à l’insu de ce dernier soit par la tante ou la grande mère en complicité avec la mère de la victime.

La nouveauté depuis quelques années, est l’excision de jeunes Guinéennes vivant en Occident. Sous le prétexte de les faire découvrir leur origine, leurs parents en profitent pour les faire exciser. Ce problème avait été signalé en 2014 par le comité interafricain sur les MGF (Mutilations Génitales Féminines) par la voix de son Directeur Exécutif Docteur Morissanda KOUYATE sur les ondes de la BBC.

Véritable enjeu de santé publique, l’excision a fait l’objet de plusieurs projets de lutte dont le plus emblématique est le projet de « dépôt du couteau » piloté par l’ONG CPTAFE en 1999 dans la commune urbaine de Kouroussa. Couronné par une cérémonie où des exciseuses déposaient officiellement et librement leurs instruments de travail en signe de renonciation à l’excision, ce projet de lutte contre les MGFs en général et l’excision en particulier, fut l’un des plus importants en Guinée. D’autres initiatives allant dans le même sens ont été ficelées notamment à l’endroit des leaders religieux. Il faut rappeler que les défenseurs de cette tradition s’appuient en partie sur des arguments à caractère religieux tandis que tous conviennent qu’aucun passage des livres saints ne mentionne ni n’encouragent l’excision.  

Mieux, le parlement guinéen a, lui, voté en des lois punissant sévèrement ceux qui se livrent à cette pratique d’un autre âge. Ainsi, l’excision a été classée dans la catégorie des crimes passibles de poursuites judiciaires aussi bien par le Code pénal guinéen que par des lois internationales que notre pays a ratifiées. Des condamnations ont été appliquées sur certaines exciseuses mais d’autres passent encore à travers les mailles du filet. Malgré donc cette armada juridique, le fléau continue son chemin avec des conséquences sanitaires immédiates (douleurs atroces, saignements…) et lointaines (troubles psychiques, VIH-SIDA, phobie des hommes, frigidité…) chez les victimes dont des cas de mort. S’ils ne s’exposent plus, les exciseuses et leurs complices continuent discrètement à mutiler de jeunes filles innocentes parfois au grand dam des autorités. De nos jours, de nombreuses associations de défense des femmes, en dépit des pesanteurs socioculturelles ont pris les devants pour mettre un terme à l’excision afin d’assurer un meilleur avenir à la génération montante.

Alpha Oumar DIALLO

 

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