Le 28 septembre va-t-il devenir un facteur de division des guinéens ?

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A uparavant, le 28 septembre était une date symbolique qui marquait l’anniversaire du vote des Guinéens contre le projet de Communauté du Général De Gaulle. Depuis 2009, elle revêt une deuxième facette, celui des massacres du stade de Conakry. Au fil des années, la date creuse un fossé entre Guinéens.

De Gaule à Conakry, archives
De Gaule à Conakry, archives

Le 28 septembre reste une date hautement symbolique dans l’histoire contemporaine de la Guinée. Pendant plusieurs décennies, elle fut célébrée comme étant la date anniversaire du vote du peuple de Guinée dans le cadre du projet de réforme constitutionnelle proposé par le général De Gaulle.

Arrivé en fanfare à Conakry le 25 août pour la promotion de son projet, le général fut triomphalement accueilli et  désagréablement surpris par la tonalité du discours du jeune leader politique, Ahmed Sékou Touré et de ses compagnons.

Sur le champ, De Gaulle dira que l’indépendance est à la disposition de la Guinée. Mais pour la prendre, il faut voter. La date retenue est le 28 septembre 1958.

Apres la victoire écrasante du NON, l’indépendance est recouvrée le 02 octobre 1958. Et depuis, chacune des deux dates est célébrée avec plus d’accents sur le 02 octobre même si tout le monde sait que sans le 28 septembre, il n’y aurait certainement pas de 02 octobre. Bref !

Les célébrations sont allées bon train jusqu’à ce jour fatidique où la date du 28 septembre fut maculée à jamais dans les annales de l’histoire du pays.

A la demande de l’opposition, des milliers de guinéens débarquent  le 28 septembre 2009 au stade du même nom pour manifester leur opposition à une éventuelle candidature du capitaine Moussa Dadis Camara. Le sulfureux et bouillant capitaine qui avait accédé au pouvoir 9 mois plutôt avec son CNDD avait semé le doute sur son intention à rester au pouvoir ou à le rendre aux civils à la suite d’élection présidentielle.

Pour lui barrer la route, l’opposition avait alors organisé une marche sur le stade de Conakry. La garde présidentielle, accompagnée d’autres unités de l’armée,  réprime la manifestation avec une violence extrême jamais connue de mémoire de Guinéens.

Le bilan est lourd, plus de 150 personnes tuées et des centaines de femmes violées en pleine journée.

Depuis cet évènement, la célébration du 28 septembre à un goût amer. Faut-il célébrer le vote au referendum ou commémorer le massacre de Conakry ?

A l’arrivée au pouvoir du Président Alpha Condé, l’espoir fut grand quant à la tenue d’un procès juste et équitable afin de situer les responsabilités. Mais depuis 9 ans, aucune action concrète n’a été posée malgré l’accompagnement de la CPI et du reste de la communauté internationale.

En plus de la lenteur judiciaire, une autre préoccupation plus sérieuse fait son apparition : la division des Guinéens sur la place du 28 septembre. Pour d’aucuns, seul l’aspect historique lié à l’indépendance du pays doit être célébrée. Pour d’autres, autant qu’il faille célébrer le 28 septembre 1958, autant il faille également commémorer les évènements tragiques de 2009.

L’Etat guinéen qui est le père de la Nation et garant de l’unité nationale semble avoir fait son choix entre les deux. Vraisemblablement, il a choisi le camp de l’indépendance.  A tort ou à raison, il est reproché à la gouvernance actuelle de ne pas faire assez pour tenir ce procès.

En effet, des personnes accusées dans le dossier des tueries de 2009 occupent encore des fonctions au sein de la haute administration publique.

Mais le symbole qui marqua les esprits fut certainement la célébration du 60eme  anniversaire de l’indépendance au stade du 28 septembre en octobre 2018. Pourtant, le stade de Guinée dans le quartier de Nongo est plus beau, plus moderne, plus accessible et deux fois plus grand (50.000 places contre 25.000) que celui du 28 septembre.

A la surprise générale, le choix du gouvernement tomba sur le mythique et controversé stade de Dixinn, provocation des victimes ou soucis de saluer la mémoire des devanciers, beaucoup d’observateurs ont estimé que l’exécutif pouvait choisir un endroit qui traine moins ou pas de casserole.

Aujourd’hui, il suffit de promener sa vue sur les réseaux sociaux pour voir la fracture qu’il y a entre les pro 28 septembre 2009 et leurs compatriotes du 28 septembre 1958.

Si cette situation persiste, il va s’en dire que cela pourrait être un obstacle à l’unité nationale et à la cohésion sociale du pays.

Il revient à l’Etat, qui est le principal accusé dans cette histoire, de panser les plaies, rendre justice et réunir définitivement ses enfants autour d’un idéal commun.

Alpha Oumar DIALLO

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