Interview inclusive d’aboubacar soumah : un syndicat soutenu par les travailleurs, un autre au service du pouvoir

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 En cette matinée du Samedi 27 Janvier, la direction de Newsguinee a été reçue au domicile modeste du tout nouveau Secrétaire Général du Syndicat Libre des Enseignants et Chercheurs de Guinée ‘’SLECG’’ le camarade Aboubacar Soumah

 Monsieur Soumah bonjour, hier vendredi, il était prévu l’organisation du congrès national du SLECG mais les évènements se sont déroulés autrement, pouvez-vous revenir sur les faits ?

Effectivement, très tard dans la nuit d’avant-hier, vers 23H, on nous a informé que la salle que nous avons louée n’était plus disponible. Nous avons dès lors voulu renvoyer notre congrès à notre siège mais là aussi, nous avons constaté que le siège était complètement quadrillé par les forces de l’ordre. Nos camarades ont alors proposé d’aller tenir notre congrès au centre islamique dans l’enceinte de la grande mosquée. C’est ainsi que nous nous sommes rendus là-bas. Entre temps, la police a investi ces lieux en nous chassant, en nous séquestrant, elle a d’ailleurs réussi à enfermer une dizaine d’entre nous. C’est comme cela que les camarades se sont rétractés, une fois libérée, la majorité a proposé qu’on tienne notre congrès ici. Tous nos camarades étant là, toutes les préfectures étant représentées, tous nos détenus étant libérés, nous avons alors organisé notre congrès là.

Je rappelle que nous avions déjà tenu le précongrès dans la salle de conférence de la mairie de Dixinn. Pendant lequel, nous avons adopté nos textes juridiques, procédé au vote et à la mise en place du bureau.

Le lendemain donc hier, on devrait simplement procéder aux formalités de présentation aux officiels et aux invités mais nos détracteurs, s’appuyant sur l’état, ont voulu nous en empêcher, c’est d’ailleurs ce qui a fait que nos invités n’ont pas répondu présents mais, nous avons quand-même procédé aux élections proprement dites et nous avons publié la liste des membres du bureau élu.

Qui a été élu ?

Moi, j’ai été élu comme Secrétaire Général (SG) du Bureau Exécutif (BE) du SLECG. Ensuite, nous avons élu 23 membres dont Portos Diallo comme premier Secrétaire Général Adjoint. A l’issue de ces élections, 90% des élus ont été des jeunes, c’est ma plus grande fierté. Le BE a été complètement rajeuni et là, ce fut un avantage énorme pour les jeunes, pour lesquels, je lance un appel très pressant, au risque de vivre éternellement dans la précarité, qu’ils prennent conscience de notre situation, qu’ils se lèvent et se battent.

Pendant ces élections, des personnes ont été arrêtées, ensuite nous avons appris qu’elles ont été libérées, mais comment avez-vous fait pour libérer ces enseignants détenus ?

Bien ! lorsque je n’étais pas encore arrivé sur les lieux, on m’a appelé pour me dire que les camarades ont été arrêtés. J’ai appelé le Ministre d’Etat Tibou Camara avec qui, j’étais déjà en entretien, je lui ai donc dit de faire quelque chose. Automatiquement, il a pris l’engagement qu’il fera libérer ; c’est ce qui fut fait.

Hier, nous avons été informé que vous avez été auditionné dans un escadron jusqu’à 21h comment vous avez pu vous retrouver là ?

Oui effectivement, j’ai été convoqué par l’escadron régional dirigé par le Colonel Balla Samoura. Depuis avant-hier, j’ai reçu une convocation d’un agent qui me l’a déposé au siège du SLECG. Aussitôt j’ai saisi mon avocat, Maitre Béa, qui s’est tout de suite chargé de cette affaire. Il a pris la convocation et a répondu à ma place. Il y est parti, on lui a expliqué le motif ; il m’a ensuite suggéré de me présenter sur les lieux à 17H. C’est ce que j’ai fait.

De là, il m’a été informé que c’est l’ancien Secrétaire Général Sy Savané qui a porté plainte contre moi avec deux charges :

La première charge était, effraction du secrétariat du SLECG, il a allégué que j’ai volé les cartes qui y étaient et pour la deuxième charge, que j’ai fait une usurpation de titre.

Justement pourquoi aujourd’hui, en dépit du résultat de ces élections, Sy Savané et cie, continuent à vous diaboliser ?

Bon, vous savez c’est une guerre de leadership. La seule vérité est que Savané et ses amis ont perdu la base, c’est lui-même qui a dit qu’il n’a pas à se référer à la base ; dès lors, la base lui a rejeté. Or, le syndicalisme, c’est la représentativité. D’ailleurs, c’est pour cela qu’il s’est appuyé sur l’Etat pour prendre toute cette batterie d’actes contre moi. D’abord, il m’a suspendu du SLECG ; ensuite, renforcé par Louis Mbemba Soumah, ils m’ont exclu du SLECG et de l’USTG. Or, -et lui, -et Louis Mbemba Soumah, nous avons été tous élus par le congrès. Dans les textes juridiques du SLECG et de l’USTG, aucune disposition ne fait allusion à l’exclusion on y parle plutôt de suspension. Aucun élu n’a la qualité d’exclure un autre. Sans l’appui des autorités au sommet, jamais ils ne pourront constituer ces charges fallacieuses contre moi. Comment, quelqu’un qui possède la clé d’un bureau, peux-tu poursuivre ce dernier pour effraction ? c’est tout simplement aberrant.

Vous pensez donc que c’est le ministre de l’éducation qui se trouve derrière ?

Oui en effet. C’est lui en premier qui a commencé à prendre des actes contre moi, en disant qu’il me mettait à la disposition de la fonction publique ensuite il a commencé à prendre des actes via des responsables syndicaux se trouvant sous ses bottes. Aujourd’hui, il y a une dizaine d’actes prisent contre moi par le Ministre. Plus grave, dans sa tournée à l’intérieur du pays, il profite pour de plus belle, sa campagne de désinformation me concernant surtout au niveau des enseignants qui, malgré tous les moyens de pression déployés, ne l’écoutent point.

Tout dernièrement, après le non-respect du moratoire proposé par les religieux, ceux-ci se sont complètement retirés du processus de négociation, pensez-vous être en droit de relancer la grève ?

Nul ne peut nous donner ou nous retirer notre droit à la grève, c’est notre constitution qui le consacre. Je rappelle que nous avions suspendu la grève sur la demande des religieux et sur autorisation de notre base. En tant que bons croyants, si nos chefs religieux nous demandent de surseoir à la grève pour qu’ils interviennent dans la résolution du problème ; naturellement, nous ne pouvons qu’accepter.

Mais à ce jour, l’Etat refuse toujours de respecter ses engagements. Cependant, n’eut été ces élections qui profilent à l’horizon, nous aurions déjà relancé la grève.

Pouvez-vous nous rappeler ces engagements en quelques mots ?

Nous avons demandé trois points : d’abord, la levée de la suspension de nos salaires ; ensuite, le payement intégral de la valeur du point d’indice à 1030 les 40% ; et enfin, un salaire minimum de huit millions de francs guinéens.

Mais, pour une sortie de crise, avec les religieux, nous avons proposé ceci : si l’état ne peut pas payer intégralement les 40%, que les 20% soit payés en fin novembre 2017 et les autres 20% dans le premier trimestre de l’année 2018 ensuite on ouvre le couloir de discussion pour les huit millions.

Bref, ce sont ces points que nous avons soumis à l’intention des religieux.
Si l’état ne nous paye pas les 40% maintenant là, rien ne nous empêchera de rouvrir encore la grève.

Ce matin, nous avons été informé que le bureau dirigé par Sy Savané s’est déployé à l’intérieur du pays pour installer des bureaux parallèles ?

Le nouveau bureau élu est entrain d’envoyer des courriers à l’intention de tous nos représentants de l’intérieur les informant que le bureau piloté par Sy Savané ne représente plus le SLECG. Ils sont en effet, un SLECG placé sous la tutelle du gouvernement. Nous dirons aux collègues enseignants, que le SLECG de Sy Savané n’est plus le SLECG libre de Guinée mais plutôt le SLECG étatique de Guinée.

Hier, le problème essentiel de Monsieur Soumah dans un seul terme, L’ILLEGALITE bien qu’étant soutenu par la base. Mais aujourd’hui, suite à ces élections, pouvons-nous déduire que vous avez réussi à être dans la légalité tout en sauvegardant votre légitimité ?

Justement, c’est pour cela que nous n’avons pas voulu lancer cette troisième phase de grève à cause de ce problème d’illégalité entretenu non seulement par nos détracteurs mais aussi par les autorités. Mais aujourd’hui, nous avons la légalité parce que nous avons été élus en vertu de nos dispositions statutaires par les délégués de toutes les préfectures du pays ; en plus de cette légalité, nous avons désormais toute la légitimité nécessaire. D’ailleurs, en matière syndicale, ce qui est plus important dans les revendications, c’est la légitimité et çà, nous l’avions déjà.

Pour nous, à ce jour, le pouvoir ne peut désormais nous opposer aucun argument valable allant dans le sens du refus de négociation à notre égard.

Donc, s’il n’y a pas de suite heureuse jusqu’à la fin de ces élections communales, peut-on supposer que la grève sera relancée ?

Oui absolument.

Quel message avez-vous à lancer à l’endroit de vos collègues enseignants et aux parents d’élèves ?

 Pour les enseignants, le message que j’ai à lancer, c’est de rester vigilant et d’être conscient de la vie que nous sommes en train de mener, une vie pleine de précarité et qu’ils se lèvent tous ensemble comme un seul homme pour engager une lutte farouche en faveur de la défense de nos intérêts pour ainsi améliorer les conditions de vie de tous nos enseignants.

Aux parents d’élèves, je leur demanderai de comprendre que nous nous battons pour améliorer nos conditions d’existence. Ce qui par voie de conséquence, entrainerait ipso facto, la qualification de la qualité de l’enseignement que nous donnons aux enfants. Surtout, qu’ils sachent jalousement garder leurs enfants à la maison contre les balles réelles de nos tueurs des forces de l’ordre pendant les différents jours de grève.

Monsieur le secrétaire général du SLECG, merci

C’est moi qui vous remercie.

 The Cheringan

 

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