Guinee – journalisme : un métier qui rime avec précarité (grand reportage…)

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L a plupart des journalistes guinéens vivent dans des conditions précaires. Une situation qui doit interpeller aujourd’hui les patrons de médias. Ces professionnels de la presse travaillent dans une précarité sans précédent. Ce qui parfois les amène à se déguiser en journaliste d’affaires en vue de faire face aux besoins de leurs familles.

De nos jours, ils sont nombreux dans les rédactions à tirer le diable par la queue. Ils pratiquent la profession de journalisme par passion. Mory Doumbouya, auparavant journaliste à Kankan, explique : « parler des conditions de vie des journalistes franchement, c’est très misérable. Moi qui vous parle, j’étais au sein du groupe Dabo média à Kankan et à Baobab FM même, on travaillait dans des conditions misérables. On a travaillé jusqu’à dix (10) mois, il n’y avait rien. Même la logistique, il n’y en avait pas, les accessoires qui nous permettaient de travailler manquaient totalement au sein de la boîte », témoigne-t-il.

Malgré les difficultés que traverse parfois sa radio, Abdoulaye Kaback Camara, rédacteur en chef de la radio Familia FM, parvient à satisfaire ses besoins : « vous le savez comme moi, il n’y a pas mal de journalistes qui n’ont toujours pas le SMIG, il y a d’autres qui perçoivent jusqu’à maintenant 200 000 Gnf, 300 000 Gnf, mais quant à moi, j’ai commencé le stage ici à la radio Familia FM, aujourd’hui, je suis le rédacteur en chef. Les conditions de traitement du début et celles d’aujourd’hui ne sont plus les mêmes. Malgré la situation que traverse parfois la radio, ce que moi, je perçois me permet de subvenir à certains de mes besoins », nous a-t-il confié.

Conscient des conditions difficiles des journalistes, Mamadou Lamine Barry, journaliste au groupe Évasion, interpelle les patrons de médias : « nous devons avoir une certaine objectivité, mais lorsque vous évoluer dans des conditions difficiles, il est impossible que vous fassiez correctement ou librement votre travail. Donc, moi, j’interpelle les patrons de médias pour revoir les conditions dans lesquelles leurs journalistes évoluent. Je sais que ce monde, le monde médiatique guinéen ne rapporte pas beaucoup, mais il faut créer des conditions pouvant permettre aux journalistes d’avoir le minimum, parce que lorsque vous n’avez pas le minimum, vous êtes obligé, excusez-moi, de devenir un journaliste alimentaire », regrette cet autre confrère.

Les journalistes doivent avoir le courage de dénoncer l’injustice dont ils sont victimes. De même, il est important pour eux selon Mamadou Aliou Bangoura de se remettre en cause : « on se met tous les jours à critiquer la mauvaise gouvernance, à parler de tout et laisser pour nous, vous imaginez combien de fois cela est paradoxal ? Donc il va falloir que les journalistes prennent leur responsabilité et dire à leurs patrons qu’ils valent quelque chose. Mais il y a une chose qu’il faut rappeler, si vous voulez un bon salaire, il va falloir que vous aussi, vous regardiez votre niveau, vous vous remettiez en question, est-ce que vous avez vraiment cette potentialité ? Alors si vous n’en avez pas, il faudra que vous vous formiez. Demandons que nos conditions soient améliorées, mais formons-nous pour que vraiment, on ait quelque chose à vendre à nos patrons », estime ce journaliste de la radio Lynx FM.

Selon le président de l’URTELGUI, les patrons de presse ne sont pas de mauvaise foi dans le paiement des salaires. Il estime que ces derniers connaissent des difficultés qui ne leur permettent pas de satisfaire amplement leurs employés : « Il y a des patrons qui me font des confidences qui font cinq mois, six mois sans pouvoir payer leurs travailleurs, vous pensez que c’est un refus ? Ce n’est pas un refus, parce que ce patron est confronté à des difficultés, à des problèmes aujourd’hui. Est-ce qu’il faut préserver les outils de travail ou payer les gens et fermer ? Donc nous sommes aujourd’hui devant un dilemme cornélien. Les radios ne gagnent absolument rien, les coupures d’électricité aujourd’hui, font que toutes les radios se sont affaissées », se justifie Sanou Kerfalla Cissé.

L’exercice du métier de journalisme en Guinée relève d’un véritable parcours du combattant. Qu’à cela ne tienne, le soin de l’image de ce noble métier doit être une préoccupation majeure.

Tout récemment, des journalistes de la radio Bonheur FM, ont cessé toutes activités au sein de leur station de radio dénonçant leurs mauvaises conditions de vie et de travail. Aujourd’hui, rien ne va au sein du groupe Allô média de dame Chantal Colle, où des journalistes viennent de déclencher une grève générale illimitée. Ces travailleurs de la radio Chérie FM et la télé TATV dénoncent également de mauvaises conditions de travail et réclament le paiement d’arriérés de salaire. Ces cas illustratifs, doivent interpeller.

Tomou TRAORE

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