Et si tout ceci n’est que mirage ?

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D epuis 2015, la fièvre d’une tentative de modification de la constitution guinéenne pour permettre au Président Condé de s’offrir un troisième mandat agite les esprits, fait couler beaucoup et surtout beaucoup de salives. Même si le principal concerné ne s’est toujours pas prononcé officiellement, il donne libre cours aux partisans de ce projet maléfique. Mais attention, Alpha Condé n’a toujours dit mot et il peut surprendre.

Au cours d’une conférence de presse en début 2016, un journaliste pose la question de savoir si le Président de la République modifierait la Constitution pour briguer un 3eme mandant, alors que ce dernier entamait à peine son deuxième et dernier mandat. La réponse de l’illustre conférencier va jeter un pavé dans la mare et susciter d’énormes polémiques sur son intention de s’éterniser au pouvoir en violation systémique de l’article 154 de la loi fondamentale. Et depuis, la polémique gonfle. Ce qui n’était au départ qu’une rumeur tend à se réaliser petit à petit avec les conséquences humaines et budgétaires qui vont avec.

Pourtant, Alpha Condé ne s’est toujours pas prononcé en faveur d’un mandant de plus. D’ailleurs, a-t-il besoin de le dire ? L’actuelle Constitution, sur laquelle il a juré à deux reprises, le lui interdit à jamais. Donc nul besoin de se prononcer sur la faisabilité de ce qui n’est pas faisable et qui ne se fera jamais.

A voir les observateurs s’adonner à cœur joie à ce problème qui n’en est pas un, l’on se demande s’ils connaissent réellement qui est aux commandes des Rivières du Sud.

Alpha Condé est un vieux crocodile de la politique politicienne, il ne connait que ça. Malheureusement cela ne sert nullement le pays qu’il prétend développer. Son allié préfèré : le temps. Il s’en sert pour dribbler ses plus redoutables adversaires et pour faire oublier le peuple de ses bévues et de celles de ses commis. Ce monsieur au regard narquois a dans sa gibecière milles et un pion pour déjouer tous les pronostics que les uns et les autres pourraient porter à son encontre. Et si son intention était de créer une grande diversion afin de mener à bien son autre projet.

En créant l’idée qu’il pourrait se représenter en 2020, Alpha Condé tue dans l’œuf toute velléité de dislocation de son parti avant cette date.

En effet, c’est un secret de polichinelle que le RPG-arc-en-ciel est traversé par des courants différents que seul lui Alpha arrive encore à fédérer. Comme il le dit lui-même, que pensera le «RPC» des arrivants de la 25 heure ? Ces deux courants maintiennent une unité de façade mais se regardent en chiens de faïence sur fond de velléité régionale.

Ensuite s’il affirme ne pas vouloir se représenter en 2020, les jeunes loups et les audacieux prendraient chacun leur bâton de pèlerins pour se partager la haute Guinée, bastion naturelle du leur parti d’origine. Saloum Cissé, Paul Moussa Diawara, Mamady Diawara sont les exemples parfaits de ce scénario. En attendant le moment opportun, le vieux fait mystère de son choix sur un potentiel dauphin.

Secundo, et c’est le plus dangereux, le mirage du coup d’Etat constitutionnel pourrait avoir pour but d’occuper l’opposition afin de l’empêcher de peaufiner une stratégie de succession du Fama.

En effet, les relations entre le pouvoir et l’opposition a toujours été semblable à celles entre un voleur et le chien de garde. Le voleur occupe l’animal avec un os viande pour mieux se concentrer sur sa mission.

Si l’opposition est certaine que le fauteuil est prenable en 2020, elle aura suffisamment de temps pour murir et mettre en place une solide stratégie pour chasser le RPG du trône. Le pouvoir qui est déjà suffisamment décrié pour ses 9 ans de gestion catastrophique ne pourra se baser que sur peu d’arguments pour rester. A ce moment, même l’argument ethnico- régional ne passera pas. L’état-major du RPG en est bien conscient.

Enfin, pendant que les forces de l’opposition et celles de la société civile se focalisent sur un éventuel referendum, elles oublient que les élections communales et communautaires sont loin d’être finies. Ne parlons pas des législatives et ne pensons même pas à la présidentielle de 2020. Si la pression de la rue réussit à faire abdiquer le ‘’dictateur’’ Condé et qu’il soit contraint d’organiser toutes ces élections, évidemment, priorité sera donnée à la présidentielle et dans ce cas, le nouveau venu aura le boulevard devant lui puisque l’Assemblée en face est déjà périmée.

Mais ça, c’est à l’opposition de déjouer. Le peuple lui s’occupe de Körö.

Alpha Oumar DIALLO

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