Entretien exclusif avec l’honorable ousmane gaoual diallo, député ufdg à l’assemblée nationale

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« Dès l’instant que vous avez refusé de partager aux populations les avantages de la baisse des coûts, vous ne pouvez pas les obliger à supporter les charges de la montée des prix ».

Dans un entretien accordé à notre rédaction, le député uninominal de Gaoual a échangé avec nous sur beaucoup de sujets brulants de l’actualité sociopolitique notamment la politique générale du gouvernement, l’augmentation du prix du carburant et la nouvelle loi sur la CENI.

Newsguinee. Info : quelle perception avez-vous de la politique actuellement en Guinée ?

Honorable Ousmane Gaoual DIALLO : notre pays donne le sentiment de faire le statu quo dans la mesure où les mêmes contradictions qui polluaient la vie politique guinéenne en 2010 restent encore en 2018. Les clivages communautaires sont toujours là. La mauvaise volonté, la mauvaise foi de ceux qui sont à l’exécutif partant du non-respect de la loi, des institutions sont des faits. Tout ceci contribue à crisper l’environnement politique comme cela a été observé en 2010. Déjà, on a l’impression qu’on n’a pas évolué. La justice est toujours absente, les institutions sont inopérantes, le président est omniprésent, les partis politiques pataugent dans la recherche d’un processus démocratique qu’ils n’arrivent pas à avoir. La Guinée est toujours dans une situation tendue.

Le Premier ministre, le Dr Ibrahima Kassory Fofana était devant les élus du peuple pour présenter la politique générale de son gouvernement. Votre appréciation ou analyse de son discours ?

Disons qu’il est arrivé. Il a fait sa lecture du PNDES (plan national de développement économique et social). Ce grand document fourre-tout que les Guinéens aiment exhiber, que le gouvernement exhibe en disant que c’est l’alpha et l’oméga des préoccupations des Guinéens sans qu’on ne leur dit comment et est-ce que cela a évolué, comment est-ce qu’ils vont mettre ça en mouvement, comment est-ce qu’ils vont réaliser ne serait-ce que le minimum de cela. Parce que cela demande de la méthode, des moyens, de la volonté de l’État. Toutes choses qui sont absentes de cette déclaration de politique générale. Maintenant, je pense que le développement dans notre pays dépend de la volonté du Chef de l’État de sortir les Guinéens de l’ornière. Cela s’appelle le respect des engagements, ça s’appelle la mise en place d’un cadre favorisant les investissements, le dialogue permanent. Mais ce n’est pas le chemin qui est entrepris par ce gouvernement.

Quels sont les manquements que vous avez remarqués dans ce discours du chef du gouvernement ?

Disons qu’il y a eu des oublis même sur le domaine du sport et de la culture, dans une certaine mesure de l’éducation, mais à partir du moment où il a dit qu’il n’a fait qu’un extrait du PNDES. C’est l’essentiel des préoccupations de la population. On ne peut pas parler du manquement.

La Guinée traverse une crise sociale due à l’augmentation du prix du carburant à la pompe. Quelle est votre appréciation ?

C’est quelque chose qui est mal venue. D’abord, le gouvernement a vendu beaucoup d’illusions aux Guinéens en se vantant d’avoir réalisé 8,2% de croissance l’année dernière. Les Guinéens attendent de voir l’impact de cette croissance sur leur vie, sur leur pouvoir d’achat. C’est quelque chose qu’on peut demander. Ensuite, il n’y a pas sur le marché mondial une adjudication de situation économique qui puisse rassurer les Guinéens de la nécessité de cette augmentation. Les prix des hydrocarbures sont flottants. Le gouvernement a refusé de baisser le prix lorsqu’il y a eu baisse sur le marché mondial. Donc, ce frémissement vers la hausse actuelle ne doit pas être un prétexte pour augmenter. Dès l’instant que vous avez refusé de partager aux populations les avantages de la baisse des coûts, vous ne pouvez pas les obliger à supporter les charges de la montée des prix. C’est une réalité et puis de l’autre côté, ce que c’est un petit clan de personnes qui partagent et qui consomment l’essentiel de la croissance de ce pays, des personnes qui tournent autour du Chef de l’État, sa famille et des éléments de son parti politique et qui engrangent les retombées essentielles de la croissance économique de notre pays. C’est quelque chose de difficile à encaisser par le Guinéen lambda. Le bonheur, c’est un petit clan qui le privatise.

Est-ce que l’on peut s’attendre à une réaction de la part de l’opposition républicaine ?

Non ! L’opposition a dit son point de vue. Il ne faut pas non plus croire que sur chaque sujet dans le pays, c’est l’opposition qui doit se prononcer ou qui monte au créneau. Non ! C’est un sujet global qui interpelle en première position, la société civile et les syndicats, que bien attendu, nous accompagnons. Mais ce sont eux qui sont en première ligne. Nous les accompagnons dans cette expression de la colère de la rue guinéenne.

Le ministre de l’administration du territoire, le général Boureima Condé, veut passer maintenant à la vitesse supérieure pour l’installation des élus locaux. Êtes-vous d’accord avec cette démarche ?

Bon ! Il veut passer à la vitesse supérieure, mais il n’a pas encore de véhicule. Je pense qu’il faut que les gens se tranquillisent. Boureima Condé a besoin de comprendre que dans une démocratie, ce n’est pas la force qui passe, c’est l’équité, c’est la justice, c’est la loi qui s’impose aux autres. Dès que la loi n’a pas été observée par quelle qu’institution que ce soit, sa force ne peut pas se matérialiser puisqu’après, vous allez créer un précédent, avec un processus électoral bancal où les élus vont avoir leur mandat arrivé à échéance les uns avant les autres. Et demain, pour renouveler ces mandats, ça va poser des problèmes. Et puis si l’UFDG qui contrôle plus de 40% des communes du pays refuse de s’associer à ça, vous allez faire quoi ? Installer les 60% et le reste va attendre ? Ce n’est pas un passage possible ni souhaitable. Il faut que les uns et les autres recherchent des voies et moyens pour arriver à des solutions globales du contentieux, pour permettre aux Guinéens de tourner le dos à cette crise qui n’a que trop durée.

Un mot sur la nouvelle loi sur la CENI ?

C’est une loi consensuelle parce qu’elle est l’émanation des trois groupes parlementaires de l’Assemblée nationale. Je pense que cela a fait avancer un petit peu l’institution qui va être en charge de l’organisation des élections dans notre pays.

Mais cela ne va pas susciter des remous chez les autres partis politiques qui rejettent déjà cette loi ?

Non ! La loi n’a rien exclu. Personne n’est exclu. On a mis des critères. C’est comme vous, pour être Guinéen, il faut naître en Guinée. Il faut avoir une mère et un père guinéens. Tout cela, ce sont des critères. Ce n’est pas parce que ton père et ta mère sont ivoiriens ou sénégalais et tu es née en Guinée est-ce ça te donne le droit d’être un citoyen guinéen. Il faut des critères. La loi quand elle est faite, elle ne s’adresse pas à X ou Y ou n’exclut pas X ou Y. Il faut des critères pour favoriser une meilleure décision-là. Est-ce que c’était plutôt simple de dire les partis politiques sans dire comment est-ce que sept postes vont être partagés entre 150 ou 200 partis politiques. Ce n’est pas évident. C’est là que les critères reviennent.

Votre mot de la fin ?

Disons que cette période est extrêmement tendue. Vous médias et la société civile devez contribuer à vulgariser les choses au lieu d’amplifier des rumeurs et des rancunes qui n’ont aucun sens dans le débat politique.

Merci honorable !

C’est à moi de vous remercier !

Entretien réalisé par Jean Tiby Sangaré

 

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