Dura lex sed lex : acte 2

Publicité

Il y’a encore quelques mois, lorsque le député Damaro a qualifié la justice guinéenne de tous les noms d’oiseaux. Piqués au vif, les magistrats ont réagis énergiquement et promis de ne plus être ce qu’on les reproche d’être. Il n’a pas fallu longtemps pour savoir qu’en réalité, ils ne peuvent être que ce qu’ils sont.

Le 03 avril 2019 sur les ondes de la radio Espace FM, le député de la majorité présidentielle a tenu des propos caustiques à l’égard de la justice guinéenne en général et des magistrats de la région administrative de Kankan en particulier. Ce bras de fer entre législatif et judiciaire laissait apparaitre une fissure dans le camp du pouvoir vu que dans notre république bananière, tout se résume et se confond au parti-Etat. C’était une des gouttes d’eau qui a fait déborder le vase de l’ex ministre Cheick Sacko même si ce dernier ne l’a pas mentionné dans sa brève lettre de démission. Bref.

Cet acte du député périmé a créé  une indignation sans commune mesure chez nos hommes en robes qui en ont promis de corriger cette infamie et de se libérer dès lors du joug de l’exécutif.

Cette simple déclaration était en soit une reconnaissance tacite de leur soumission au pouvoir exécutif. Cela suffit à les décrédibiliser à jamais. Mais comme nous sommes en Guinée, nous avons accordé le bénéfice de la confiance en cette déclaration même si au fond tout le monde en riait. Cette justice. Qu’est-ce qu’on n’a pas vu avec elle ?

Apres deux mois, la promesse des magistrats prend un grand coup et perd tout son sens lorsque des membres du FNDC sont arrêtés le 6 mai 2019 à Kindia à l’occasion de l’arrivée du Chef de l’Etat dans la commune urbaine. Tandis que le contribuable était dilapidé par l’achat de consciences, le déplacement dans des bus GMC de centaines de femmes à travers toute la basse Guinée, des forces de l’ordre, donc des auxiliaires de justice, empêchaient toute autre manifestation allant dans le sens contraire.

On verra les jours qui suivent que c’est ce déplacement des femmes vers Kindia qui a mis le feu aux poudres à Fria. Madame la préfète s’en souviendra. Comme quoi, tout est lié. Il faut une vérité absolue, celle d’Alpha et de ses sbires. La justice n’a pas dérogé à la règle. Sept manifestants sont arrêtés en violation de la Constitution, la mère des lois et transférés à Conakry. Apres quelques tractations et plusieurs coups de fils, ils sont libérés. La promesse n’a pas tenu.

Le 8 juillet 2019, un des plus grands pyromanes guinéens, Cheick Affan est arrêté enfin non pas pour ses propos qui appelaient à la violence physique et intercommunautaire, mais parce qu’il a fait une vidéo dans laquelle il s’oppose à l’introduction de la langue N’ko dans l’enseignement guinéen.

Dans la vidéo, le Cheick de la division tient des propos aussi ethnocentristes que celle qu’il a faite en début d’année contre d’autres des autorités de Coyah. Mais là, il s’attaquait au sacro-saint et hop, un petit rappel à l’ordre lui ait imposé de se taire. C’est là qu’intervient le grand Manitou qui ordonne de le libérer dare dare contre toutes les procédures en la matière. La justice frileuse, le fait aussitôt et le monstre se retrouve dans la nature à la recherche de chair fraiche de l’unité nationale.

Et pour prouver encore qu’elle restera ce qu’elle est, la justice condamne le 02 août 2019 Dr Faya Millimouno, président du Bloc Liberal pour ses propos amers contre Mohamed Lamine Fofana, justement ministre intérimaire de la justice. Apres avoir reconnu ses torts dans une lettre, le juge le met néanmoins sous mandat de dépôt et le conduit illico à l’hôtel 5 étoiles de Coronthie. Aujourd’hui, le leader a recouvré sa liberté par le biais encore une fois, de tractations, de coups de fils, de loobying et de rencontres très nocturnes et non par le respect des codes et procédures en matière de diffamation. Aux oubliettes la fameuse déclaration du 09 mai 2019. Bienvenue les bonnes vieilles habitudes de corruption et de zèle. On ne parle pas sous la chicotte ou quand la bouche est pleine.

Ces événements qui sont des hauts faits relayés par les medias ne sont rien face à ce que subissent quotidiennement des citoyens ordinaires dans les cours et tribunaux de notre pays.

Notre justice est lamentable et son état est piteux.  Pourtant, aucun développement harmonieux n’est possible sans une justice libre et équitable.

Tous nos actes sont légiférés et codifiés par des lois sans les lesquelles, aucune activité humaine n’est possible de nos jours.

La justice guinéenne doit définitivement clore ce chapitre qui lui fait honte et qui fait mal. Le salut de la nation en dépend.

Alpha Oumar DIALLO

Publicité