Cession du port autonome de conakry à albayrak : le scandale de trop

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S ’il y a un fait qui caractérise le régime du président Alpha Condé, ce sont bien les scandales financiers. De mémoire de Guinéens, jamais un régime n’a connu autant de soubresauts dans le détournement des deniers publics remettant totalement en cause la fameuse phrase du candidat Alpha Condé lors de la présidentielle de 2010 : « je prends la Guinée là où Sékou Touré l’a laissé. » Bravo ! De façon non exhaustive, on peut citer au professeur Condé, même s’il semble être un dirigeant amnésique, quelques-uns des acquis que le premier président de la Guinée a laissés : une compagnie aérienne nationale appartenant entièrement à l’État, un navire autonome appartenant à la marine nationale, un train reliant Conakry à Kankan via les gares de Kindia, Mamou et Kouroussa, un stade olympique, un palais de la culture (palais du peuple), des maisons de jeunes dans chacune des 38 communes du pays, les barrages hydroélectriques de Kinkon et de Tinkisso. Excusez du peu. Les infrastructures de l’époque coloniale ont également été préservées sans compter les richesses du sous-sol. Des richesses et patrimoines aujourd’hui bradés avec un degré de mépris et une violence jamais connue dans notre pays. À tel point que l’on est en droit de se demander si ce régime aspire réellement à développer la Guinée. Les scandales et leurs corollaires sont devenus le lot quotidien des Guinéens. Il ne se passe pas un jour sans que l’opinion publique ne soit ébranlée par des sujets de détournements de milliards de nos francs. Pendant ce temps, le gouvernement qui n’a nullement réduit son train de vie continue à narguer la population. La session chaotique du port de Conakry à l’entreprise Albayrak est le scandale de trop. Il est le point culminant de centaines de dossiers de vols et de détournements de deniers publics qui se déroulent à longueur de journée les uns aussi que rocambolesques que les autres. Inutile de rappeler ici toutes les affaires fumantes au pays d’Alpha. Quelques-unes ont cependant été tellement inexcusables que leur retentissement est allé au-delà des frontières guinéennes.

Affaire Palladino

Le premier scandale éclate en juin 2012 sur un dossier ourdi au courant de l’année 2010 suite au passage devant le CNT, du ministre de l’Économie et des Finances d’alors, Kerfalla Yansané. Avant même son investiture à la magistrature suprême du pays, le « Mandela de la Guinée » avait conclu un accord avec Palladino capital, une compagnie du pays de Nelson, le vrai Mandela. Cet accord s’articulait sur un prêt de 25 millions de dollars américains que la société Palladino devait accorder au président Condé au nom de la Guinée. Les clauses de l’accord prévoyaient un accès de 30 % de ladite entreprise aux actions de la SOGUIPAMI (Société Guinéenne du Patrimoine Minier) en cas de non-remboursement de la dette. Cette affaire qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive annonçait les couleurs d’autres scandales tout aussi cyclopéens. Le dossier trouvera finalement son épilogue tenez-vous bien aux États-unis par une entente à l’amiable entre le fonds d’investissements Och Ziff, propriétaire de Palladino Capital et le département américain de la justice. En tout ce fonds va payer un cumul de 412 millions de dollars répartis entre la bourse de New York (199 millions) et le département américain de la justice (223 millions). Pour le peuple de Guinée, rien. Aucune enquête, aucun coupable.

Assassinat de Madame Boiro

Le 12 novembre 2012, Aissatou Boiro directrice du trésor public est froidement abattue à Kipé alors qu’elle rentrait chez elle. Quelques minutes plus tard Paul Colle, l’informaticien qui traitait ses données est à son tour abattu non loin de là où madame Boiro gît. Le lien entre ces deux assassinats, une rocambolesque affaire de détournements de 13 milliards de francs guinéens dont les ramifications allaient du ministère des Finances jusqu’au tréfonds même du Trésor Public en passant par la banque centrale. Icône de la lutte contre la corruption, dame Boiro avait bloqué le circuit de sortie de la manne tout en démasquant le réseau mafieux qui avait ses ramifications dans sa propre direction. Elle le paya de sa vie. Aujourd’hui, bien que les exécutants de l’arrêt de mort de madame Boiro soient retenus dans les mailles de la justice, de nombreux observateurs soutiennent que les commanditaires eux se la coule douce au sommet de la chaîne alimentaire.

L’affaire Bolloré

La nuit du mardi 8 mars 2011, la garde présidentielle investit le port autonome de Conakry et y déloge les installations de l’entreprise française Getma, filiale de Necotrans au profit de Bolloré Logistics qui avait « décroché » la vieille le juteux contrat de gestion du port conteneur de Conakry. Arrivée 1er dans l’appel d’offres des autorités guinéennes sous le général Conté, Getma voit son contrat purement et simplement résilié par un décret présidentiel du « professeur » Alpha Condé. Le président dira publiquement que Vincent Bolloré est son ami et il donne le port à quelqu’un qu’il connaît, en violation des règles et procédures de passation de marchés publics. La justice guinéenne, toujours prompte à trainer les opposants du régime ne lève pas le petit doigt. À l’extrême opposé de sa sœur guinéenne, la justice française, elle, s’intéresse aux conditions d’obtention de notre port ainsi que celui de Lomé au Togo par le groupe Bolloré. Après une perquisition au bureau de Vincent en 2016, l’industriel Breton est mis en examen le 25 avril 2018 pour « corruption d’agent étranger » et ”complicité d’abus de confiance » et de « faux et usage de faux ». Pendant ce temps en Guinée, des pseudos experts s’agitent et montent au créneau pour défendre becs et ongles le contrat passé avec l’entreprise Bolloré. Pauvres de nous.

Les 700 millions de dollars US et les 10 millions de dollars américains de Rio Tinto

Le 22 avril, le géant minier anglo-australien Rio Tinto verse à la Guinée le montant faramineux de 700 millions de dollars US. À l’annonce de cette nouvelle, les Guinéens sont restés contents et septiques puisque déjà habitués aux grandes annonces sans effets réels. Les soutiens du régime ont jubilé et magnifié les talents de « négociateur » et la « rigueur » de leur champion. Sauf qu’à date nulle ne connaît la destination qu’a prise ce montant. Le président Condé, devant un parterre d’opérateurs économiques avait annoncé l’utilisation de 125 millions des 700 millions de Rio Tinto dans la construction du barrage de Kaleta. Le reste, il les a mis « en lieu sûr » et toc ! À l’hémicycle rectangulaire, toutes les initiatives de mise en place de commissions d’enquête sur ces fonds sont restées vaines, suite au blocage systématique de la mouvance présidentielle qui détient la majorité parlementaire.
En décembre 2016, une tempête judiciaire vient troubler le paisible environnement du petit palais et de Rio Tinto. Cette fois, c’est François Polge de Combret, banquier français et conseiller du président Alpha qui est mis en cause. Il aurait perçu la modique somme de 10 millions de dollars US pour ses services auprès du président pour l’obtention des blocs 1 et 2 de Simandou, la plus grande réserve mondiale de fer à ciel ouvert en faveur de Rio Tinto. Tandis que Rio mène des enquêtes internes et licencie deux hauts responsables, Alpha Condé dit n’être au courant de rien. Pire, il ne se sépare pas de son sulfureux conseiller malgré toutes les preuves accablantes brandies contre ce dernier par des journaux français. Comme à l’accoutumée, la justice guinéenne ne bouge pas. Les Guinéens broient du noir en apprenant tous les jours que leurs mandants sont impliqués dans d’aussi gros scandales.

L’aéronef et les mallettes de Dakar

Un petit coucou en provenance de Conakry atterrit à l’aéroport de Dakar le vendredi 08 août 2014 avec à son bord, 10 milliards de francs CFA. Abasourdies par le montant, les douanes sénégalaises bloquent la précieuse cargaison en attendant d’avoir plus d’informations sur ce transfert de fonds qui a tout d’une fuite de capitaux. Les convoyeurs de l’argent n’ont informé ni le ministère sénégalais des finances encore moins la douane sénégalaise. Même le ministre guinéen des finances n’en était pas informé. Finalement, après plusieurs coups de fil entre Dakar et Conakry et l’insistance du président Alpha, les fonds iront bien à leur destination. La raison d’État ayant pris le dessus sur l’éthique et la détermination des douaniers sénégalais.

Le président Condé, l’Alpha et Oméga de tous ces scandales

D’autres scandales non des moindres ont défrayé la chronique sous nos tropiques. Lors d’une de ces nombreuses sorties enflammées, Alpha Condé a lui-même déclaré avoir investi plus d’un milliard de dollars dans le secteur de l’électricité sans un grand résultat. Dans le secteur très névralgique de l’électricité, les scandales ont atteint des pics avec les affaires ASPERBRAS, AGREKO et les Mauritaniens.

L’Office Guinéen des Chargeurs, l’OGP, la Société Navale, l’Agence Nationale des Infrastructures Minières, EBOMAF et d’autres entités publiques ou travaillant avec l’État ont été au centre d’un vaste système de corruption qui a alimenté et alimente encore des réseaux mafieux dont les membres narguent les pauvres populations en menant un train de vie insolent. Le point commun de tous ces dossiers est le président Alpha Condé qui au centre de toutes ces tempêtes qui ont fini par faire de la Guinée un pays de paria et une démocratie bananière.

Alpha Oumar Diallo

 

 

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